C'est dans la région désertique de la Forêt Pétrifiée et plus précisément une petite station que l'écrivain Alan Squier rencontre la jeune et jolie Gabrielle Maple, serveuse qui rêve de quitter son bled pour la France, y étudier l'art et retrouver sa mère. Mais l'irruption d'un gangster va modifier les plans des uns et des autres...
Adaptation d'une pièce de Robert Sherwood, The Petrified Forest assume totalement son côté théâtral et Archie Mayo nous entraîne dans un huis-clos fort intéressant et plutôt efficace malgré quelques légères fautes de rythme en milieu de récit. Rien de bien préjudiciable non plus tant il rend son film plaisant à suivre en y instaurant une tension qui va se faire de plus en plus forte plus on avance dans le récit. A travers les personnages, il aborde plusieurs thèmes, traités avec plus ou moins d'insistance, notamment autour de la vie, ce qu'on doit en faire et comment atteindre ce que l'on veut vraiment.
La principale réussite vient avant tout de l'écriture avec des personnages consistants et des dialogues qui le sont tout autant. On s'attache d'abord très vite à cette jeune fille au rêve freiné par sa condition puis on s'intéresse à ce mystérieux intellectuel dont les intentions ne sont pas toujours claires et enfin on est intrigué par ce gangster froid et semblant impitoyable. C'est notamment par la façon dont il est d'abord introduit par la presse et divers commérages qu'il est rendu à ce point glaçant. Le film est divisé en deux parties, d'abord sans lui, puis après son irruption, là où les enjeux deviennent plus fort et sont bien retranscrit, tout comme l'émotion découlant de la relation entre Gabrielle et Alan.
Archie Mayo orchestre son film avec brio, procédant à un mélange des genres allant du drame au film de gangsters. Il met en place une atmosphère crépusculaire, sublimé par la quête d'Alan, le cadre du récit et par une belle photographie en noir et blanc. Il montre une certaine maîtrise des artifices du huis-clos et si The Petrified Forest est bavard, il n'est jamais lourd et l'intérêt est constamment présent. Et enfin, le film brille par ses interprétations, que ce soit Leslie Howard, Bette Davis ou Humphrey Bogart, ici cantonné à un rôle de gangster qu'il incarne avec présence et sans concession (d'ailleurs Bogart et Howard reprennent les rôles qu'ils avaient déjà tenus à Broadway lorsqu'il jouait cette pièce).
Si l'ensemble est parfois maladroit, notamment dans sa première partie, l'intensité monte peu à peu et il est bien difficile de bouder son plaisir devant cette adaptation théâtrale où Humphrey Bogart vient effrayer la vie et les rêves d'une calme et paisible station.