La Forme de l’Eau
Le titre aguicheur ainsi que le nom du réalisateur avaient de quoi faire envie. Sans parler de tout le buzz (approprié ou non, je vous en laisse seul juge) autour du film et ayant voulu conserver mon objectivité jusqu’au bout, je me suis donc rendu dans la salle sombre, plutôt enthousiaste à l’idée de voir ce que nous réservait le Maestro Mexicano et en me disant qu’avec un peu de chance cela allait être du même niveau que Le Labyrinthe de Pan (l’un des meilleurs films fantastiques de ces dernières années, rappelons-le), registre dans lequel le talent de Del Toro n’est depuis longtemps plus à démontrer.
Quel ne fut pas mon regret au bout des dix premières minutes.
D’entrée de jeu, on voit que l’eau va être l’élément principal, omniprésent tout au long du film. Logique me direz-vous, quand on jette un coup d’œil discret à l’affiche. Sauf que celui qui autrefois prêtait des caractères surnaturels à des créatures tout droit sorties d’un de nos pires cauchemars, s’essaie à nouveau à ce petit jeu mais de manière complètement à côté de la plaque cette fois-ci, intellectualisant à tout va quelque chose qui n’en n’avait nullement besoin à la base, et faisant ainsi perdre toute crédibilité au film.
Ici vous pouvez spoiler !
L’eau, élément indispensable à la vie sur Terre, est en effet ici allégorisée sous la forme de la « créature », appelons la comme ça car nous ne savons ni d’où elle vient, ni ce qu’elle fait dans un laboratoire d’expérimentation américain en pleine guerre froide. À la manière de l’Arbre-Monde dans Avatar, c’est toute l’écologie qui est mise en exergue à travers ce personnage. Bon ok, on va faire semblant d’y croire ne serait-ce que cinq minutes histoire de pas avoir payé 7€50 pour rien en tarif étudiant. Sauf que quand on prête à un ÉLÉMENT des caractéristiques sexuelles (l’exemple du personnage principal, masturbatrice compulsive qui ne peut se faire du bien sans se trouver mouillée de la tête au pied dans sa baignoire), appelez ça comme vous voudrez mais personnellement j’appelle ça de la masturbation (on y revient), intellectuelle cette fois-ci.
Un caillou est-il en effet capable de philosopher ? Nous sommes ici à des années lumières de La Sorgue de René Char, et c’en est bien triste. Sans compter les nombreux autres clichés, dégoulinants de manière on ne peut plus maladroite tout au long du film. Vous aurez ainsi droit à un florilège de politiquement correct façon "putalike" dans des sujets aussi variés et originaux que l’homosexualité, l’écologie encore et toujours, la société patriarcale aux États-Unis, l’impérialisme américain durant la guerre froide, la perfidie russe à cette même période...
Bref vous l’aurez compris, ce n’est pas du Gaspard Noé, et si vous vous attendiez à un bon film fantastique, vous avez tout faux.
Ici, Guillermo surf plutôt sur la « La La Land Wave », à savoir à grands coups de comédie musicale populaire sans aucune prise de risque, d’une niaiserie sans pareille à en faire saliver (et encore...) la ménagère quinquagénaire en proie à l’ennui entre deux lectures de 50 Nuances de Grey.
Et tout cela sans parler du jeu des acteurs, notamment celui de l’actrice principale, clairement au rabais. Pour dire, Michael Shannon est pour moi l’un des meilleurs acteurs de ces vingt dernières années, mais sa prestation ici m’a laissé pantois. Pas étonnant que le larron ait préféré aller se saouler au pub en regardant de loin la cérémonie des oscars où tous ses collègues figuraient en bonne place le soir de la consécration de l’œuvre.
Enfin, la bande son, avouons-le, est peut être la bouée de sauvetage sans laquelle La forme de l’Eau aurait tout droit sombré dans les abysses du 2/10.
En résumé, si vous avez le choix, allez voir Three Billboards, vous en aurez sans doute pour votre argent cette fois-ci. Sinon, un conseil : passez votre chemin, au risque de marcher tout droit dans la flaque.