Une scène peut-elle justifier ou sauver tout un film ? C’est la question que je me pose pour écrire cette critique.

« The Way of the Dragon », est un film de et avec Bruce Lee. La majeure partie du film est osons le dire, franchement décevante. On ne reprochera pas au scénario d’être simple, mais plutôt de ne pas toujours assumer sa simplicité, en tentant vainement de rajouter des scènes inutiles, qui sont au mieux d’un burlesque assumé, au pire juste ennuyeuses.

En effet le film brode sur son sous-thème qu’est la venue d’un chinois dans un pays, l’Italie, qu’il ne connaît pas, provoquant diverses situations gênantes pour lui-même ou les autres personnages.
On a finalement un film pas assez drôle pour être une bonne comédie, et pas assez ridicule pour être un bon nanard.

Je ne m’attarderai pas sur l’interprétation des acteurs ni sur l’écriture des dialogues, ne pouvant pas en juger correctement faute de comprendre le chinois.

Intéressons-nous plutôt directement à cette scène susceptible de justifier l’œuvre : L’ultime combat du film, duel entre Bruce Lee et Chuck Norris. Oui, Chuck Norris, le fameux. Mais trêve de suspens, l’imbattable Chuck Norris, alors inconnu, et donc pas protégé par ses Chuck Norris Facts, devras s’incliner devant le petit dragon.

La scène n’est pas spécialement bien emmenée : On a juste pu constater au préalable que Colt, incarné par Chuck Norris, est le seul combattant du film à la hauteur de Tang Lung, le personnage de Bruce Lee.
On attend donc bien évidemment leur duel avec impatience… malheureusement cette impatience est davantage due à la platitude de ce qui précède qu’as une insoutenable montée en tension du film, ici absente. Même la musique, correctement composée, est utilisée de manière trop humoristique. En somme, la tentative comique du film, peut-être un moyen pour Bruce Lee de ne pas trop sembler se prendre au sérieux, nui-t-elle à l’ambiance générale du film.

Le scène se passe dans le Colisée de Rome, alors vide. Tang Lung aperçois d’abord son adversaire de loin, et sait qu’il ne peut échapper au combat. Les deux hommes se retrouvent donc en bas du Colisée, dans un décor de pierres froides et de colonnes millénaires.

Quelques mots sur nos deux personnages : Tous deux ne se connaissent pas, mais savent qu’ils doivent s’affronter, étant tous deux en quelques sortes des mercenaires à la solde de deux factions ennemies.
Un évident respect entre les deux combattants est montré : Chacun des deux prends le temps de s’échauffer, presque côte à côte ; lorsqu’un des deux est à terre, l’autre attend qu’il se relève ; et enfin, Chuck Norris mor, Bruce Lee dépose la veste de kimono du défunt sur son visage, comme pour préserver son corps. Ce respect, déjà présent avant le début du combat, est peut-être renforcé par l’attitude de Colt sur la fin du duel, se relevant encore et encore, alors que les deux adversaires ont déjà compris quelle en sera l’issue.

La mise en scène semble influencée par les westerns d’Ennio Morricone. Le cadre est épique, et le duel est ponctué par des interventions d’un spectateur inattendu : un chaton, renforçant l’intensité dramatique. C’est même un miaulement qui brisera l’observation silencieuse et mutuelle des deux duellistes.

Les plans de caméra, typiques des films d’arts martiaux chinois avec leurs plans en pieds permettant de bien voir les mouvements martiaux, sont tous très bien travaillés. De plus le montage trouve son dynamisme et son rythme à l’aide de quelques plans de face, dans les quels Bruce Lee ou Chuck Norris semblent frapper la caméra.
Et surtout, on notera un superbe plan long, au ralenti, pendant lequel Bruce Lee évite une longue série de coup de pieds de Chuck Norris, affirmant ainsi sa supériorité technique, premier pas vers l’ascendant psychologique qu’il prendra sur son adversaire, après un début plus difficile.

Alors, oui, cette scène de combat sauve véritablement « The Way of the Dragon », mais pour véritablement justifier le film, il aurait sans doute qu’elle soit mieux emmenée, mieux servie par l’ensemble du film.

Il en reste que cette scène est un grand moment de cinéma d’arts martiaux, et même un grand moment de cinéma tout court, que je recommande donc.
Matthieu_Eira
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le 9 févr. 2015

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