Après le craquant "Tempête de boulettes géantes", adaptation délirante d'un livre pour enfants, Phil Lord et Christopher Miller remettent le couvert avec un concept encore plus louche, à priori grosse soupe mercantile en l'honneur de la marque de jouet qui laissait craindre un Bandai-like movie sans âme. Il y a forcément de ça mais Lego a heureusement tout un monde créatif à vanter et le second degré des deux lascars y colle parfaitement, leur capacité à maintenir un rythme infernal aussi et leur oeil fabuleux pour rendre tactile, chaleureuse, enfantine et accueillante la moindre texture est aux avant-postes.
L'image de synthèse est aujourd'hui à un niveau tel que reproduire les textures exactes de Legos et les mouvoir comme de vrais Legos sembleraient presque facile. Les animateurs ont en gros fait de la stop-motion avec des Legos virtuels. Le résultat est très proche de la réalité au point de prendre les images pour de la vraie stop motion. Quand on en vient à découvrir les yeux écarquillés un navire voguer sur des mers de Legos, il est difficile de ne pas craquer se rappelant la grande table spéciale où tout un monde se construisait dans sa chambre.
Lorsque le film rejoint finalement dans sa dernière demi-heure la réalité et confirme ses intentions de relier le consommateur à notre héros, Emmet le loser de service, les choses deviennent ouvertement beaucoup plus grasses et n'évitent pas la repompe Toy Story mais ont l'avantage de vanter un slogan qui fait toujours honneur à la marque : libère ton imagination, ne suis pas connement le manuel.
"Lego Movie" repose sur ce slogan, développe cette idée au maximum jusqu'à en faire une quête quasi-matrixienne, empruntant au passage quelques ingrédients mal exploités dans "Les mondes de Ralph", largement mieux tenus ici par l'humour très particulier des deux réalisateurs super geeks, leur talent pour pondre une horde de personnages secondaires aussi évidents que formidablement jouissifs et une suite de scènes d'action quasiment inarrêtable. On retrouve d'ailleurs le personnage du flic surexcité mu cette fois-ci en Gollum schizophrénique (irrésistiblement doublé par Liam Neeson). Ces mecs sont fous. Avec Lego, ils peuvent en plus utiliser directement d'autres franchises tels Superman, Star Wars, Wonder Woman, etc, etc.
Il est absolument impossible de rester de marbre devant Batman exposant la puissance des enceintes de sa batmobile avec sa dernière composition hard-indus "Darkness ! No parents !". Il est absolument impossible de résister à cet amoncellement de Legos en mouvement où les créations les plus folles prennent vie devant nos yeux innocents.
Par contre, il n'est pas interdit d'avoir une juste réserve sur ce scénario multi essoré même par Bob l'éponge du héros malgré lui qui va sauver Legoland de la dictature du Président Business. Mais bon, Will Ferrell déchaîné aussi. Et Phil Lord et Christopher Miller savent encore une fois utiliser des concepts surexploités pour les tordre vers une petite critique de la dictature mercantile, entendue et bien pratique certes, mais assez jouissive. C'est pas du contemplatif, ça c'est sûr... On n'est pas loin du 8 sinon.