Pour lire en musique, Drunken Sailer des Irish Rovers.
L'art de la séduction est un art complexe, qui demande du temps, de l'investissement et ce ne sont pas les habitants de Sainte-Marie-la-Mauderne qui vous diraient le contraire. Petit village de pêcheurs moribond, le lieu de villégiature de nos protagonistes est menacé d'extinction, l'hémorragie démographique tuant le village à petit feu. Les cent-vingt-cinq âmes qui y résident vivent de l'aide gouvernementale, aide insupportable pour les fiers pêcheurs. Aussi, lorsque une usine se propose de s'installer dans le village, l'espoir renaît. Reste à convaincre un médecin de venir vivre à Sainte-Marie et de signer un contrat pour cinq ans.
Résolument classique, La Grande Séduction de Jean-François Pouliot est un petit concentré de bonhomie et de rire. Si on se prend à rêver d'une trame moins prévisible, on est rapidement emporté par les tentatives désespérées et désespérantes de nos braves pêcheurs, un peu bourrus mais si attachants. L'incursion du XXIème siècle, par le biais de ce chirurgien plasticien adepte de la grande ville et de son tourbillon trépidant est prétexte à un combat entre moderne et mauderne. Bataille dont le village sort vainqueur et le spectateur, comme le médecin, est complètement séduit.
Jean-François Pouliot porte sur ces pêcheurs un regard bienveillant et traite intelligemment de la désertification des petits bleds qui souffrent du marasme économique, de la diminution de la flotte de pêche et de la baisse des activités halieutiques sans bêtement confronter urbanité et ruralité. Il s'attache à redonner leur fierté à des hommes dont la seule volonté est de travailler pour vivre tout en restant dans le lieu qui les a vu grandir.
Convenu, prévisible, mais étonnamment frais de par sa thématique et drôle par les maladresses et combines des villageois désespérés. Le film recèle un immense capital sympathie, et vaut bien plus le détour que sa version française. L'accent québécois ne gène absolument pas, mais si vous en avez peur, la version canadienne "The Grand Seduction" reprend le même canevas et les mêmes gags avec de bons acteurs.