On croirait assister à un film tout droit sorti de l’expressionnisme allemand. Faisceaux lumineux, décors peints, étonnante ambiance onirique... Moins fiévreuse, cependant, moins névrotique qu'un Cabinet du Dr Caligari. Herzog s'intéresse moins à la folie humaine (qui aurait pu être métaphorisé assez grossièrement par cette caverne) qu'à la parole véritable de ce souterrain, qu'à l'atemporalité de l'art, qu'à la démonstration d'un humanisme comme on en a trop rarement vu ces dernières années (même chez Spielberg, malgré son récent renouvellement avec Tintin et Cheval de Guerre). Dilatation de l'espace temps et des repères spatiaux : les faisceaux lumineux de Herzog ciblent les peintures, notre proximité avec celles-ci est telle qu'on ne sait plus si on suit l'équipe du film ou le créateur de ces fresques. L'incroyable mobilité de ces mêmes faisceaux offrent à ces peintures en 3D (elles s'approprient les aspérités des murs) une mouvance, une vie extraordinaire. Plus qu'une simple illustration de "la vie préhistorique", ce que la caverne communique(et ce que Herzog, avec une grande humilité, nous transmet), c'est une histoire située en dehors des époques et des espaces, une vision atemporelle de l'homme et de son rapport au monde. Ce qui est conservé des jets de lumière de l'expressionisme allemand, c'est le regard sur l'esprit humain, discerné ici à travers le prisme atemporel de la roche, l'inconscient silencieux de la grotte Chauvet.