Avec de tels constats sur le système éducatif, pas étonnant qu'on soit infoutu de proposer une réfor

Je viens de voir ce film, et je suis sous le choc.
Il y a en germe des thèmes sur lesquels je suis cent fois d'accord, et sur lesquels je crois nécessaire que l'on exprime. La situation des profs dans les zep, et autres "établissements difficiles", leur dépression, leur manque de réponse lorsqu'ils cherchent du soutien. Les difficultés de concilier conscience personnelle et professionnelle, la recherche à tout prix d'une manière de pratiquer son métier, entre compromission avec la laïcité ou copinage. La situation de ces proviseurs, qui, pour éviter le pire, sacrifient leurs enseignants, en essayant de ne pas empirer la situation de leur établissement. La saloperie de ce système de "vases communicants", qui font que lorsqu'un élève est exclu de son collège/lycée, il reporte simplement ses problèmes ailleurs, sans qu'on juge nécessaire de faire quoi que ce soit. L'indifférence totale des sphères politiques, qui ne jurent que par une course effrénée à l'image et à l'opinion, sans jamais se préoccuper du réel vécu sur le terrain, et des vrais besoins qu'on y éprouve. La déshumanisation, enfin, de tous côtés, quand une vie humaine compte en fait moins que le profit, quel qu'il soit, qu'on peut y tirer.
Oui, c'est d'une importance capitale. Mais ce film, ce putain de film qu'on porte aux nues pour son message, regardez le de près. Il ne dit rien.
Vous n'êtes pas d'accord, hein? Commençons.
On a affaire à une pauvre nana dépassée par son métier, ses élèves turbulents, et le silence qui règne, même dans le pire boucan. Très bien, c'est montré correctement. Mais à côté de ça, on va nous montrer son mari, qui l'a quittée, la pauvre, ça la déséquilibre. Alors, monsieur le réalisateur, je m'en vais vous dire quelque chose. Vouloir faire un film sur une nana qui revendique haut et fort son droit à être une femme, et non pas une inférieur, la subordonner au départ de son mec, ça la fout mal. Mettre ça en place juste pour pouvoir créer un pseudo lien de confiance avec le policier, c'est sale.
Parlons-en, du policier. Vivant symbole de l'humanité que parfois, on peut croiser au coin de la rue, quand on a de la chance, se fait quitter par sa femme, on suppose parce que son boulot le tient trop souvent éloigné de la maison. Il est un peu le double de notre Sonia, mais version homme : malgré tout, il fait son devoir, et ne craque pas. Lui. Merci encore, monsieur le réalisateur.
Autour de lui, un collègue bourrin, qui veut attaquer à tout prix (on verra bien le prix, d'ailleurs), parce que la police, tu comprends, c'est des bourrins. Encore à côté, une ministre, qui cherche avant tout à protéger l'image de son école, dont il ne faut surtout pas qu'on montre la pourriture. Bon, ça, ok, je l'admets. Elle me fait penser à Pécresse, pas vous?
Les élèves? Bon, je ne parlerai pas des hasards qui font que ceux qui se retrouvent là, c'est ceux qui ont des liens particuliers qui les lient, et non pas des conards lambda, hein. En dehors de ça, on a le grand black méchant, son pote blanc méchant (qui meurt à la fin, la FUCKING MEILLEURE SCENE DU FILM. Juste parce que j'avais vraiment envie de le voir crever, rien d'objectif.), la nana grande gueule qui va s'allier au prof et entraîner les autres avec elle (tu vois, les arabes, c'est pas méchant, en plus, à la fin, on apprend que la prof elle est arabe aussi, TROP OUF TAVU), son pote qui OMYGAUDE IL A UNE CEINTURE POUR LIGOTER LE MECHANT BLANC HEUREUSEMENT QU IL EST LA, le mec qui se fait racketter (dude, on est dans un film sur un collège, sans rackett, ça ne marche pas), la nana qui compense visiblement par la bouffe un événement traumatisant de sa vie (MAIS LEQUEL? de toute façon, ne t'inquiète pas, super prof va tout régler, meuf.), et quelques autres qui sont là pour occuper des chaises.
Bon, en gros, une quantité certaine de clichés. Mêlés à une quantité certaine de réalité, mais quand on joue aussi mal que la totalité de acteurs, vaut mieux éviter le scénario cliché à la base.
J'ai déjà écrit longuement, alors je vais juste finir sur la prof. Cette nana pète un plomb, et taxe un flingue. Jusque là, tout va bien. Ensuite, elle fait cours "normalement", grâce à la menace du flingue, qui lui permet de savourer ce pour quoi elle avait sciemment choisi d'exercer ce métier. Très bien, encore une fois. Coup de téléphone du raid, elle panique, et là, ça part en cacahuète. Soit.
La trame tient la route. Alors, qu'est ce que je lui reproche? Je lui reproche d'incarner toute la bien pensance de notre système, qui refuse de se remettre lui même en question au delà d'un certain point. Certes, la situation des profs est extrêmement difficile, mais dans quelle mesure celle des élèves nous est elle donnée? Dans quelle mesure montre-t-on le racisme ordinaire, les familles éjectées de France, le mépris quotidien, qui engendre lui aussi cette obsession mal placée du respect? MOINS DE CINQ MINUTES DANS LE FILM, BORDEL ! Dans ma perception des choses, cela donne un point de vue partial, au service de la seule cause qu'on veut défendre. Celle de la culture (du prof) contre "la sauvagerie" (terme ou famille du terme employé au début du film, si si.) de ces petits cons dans les cités. On a affaire ici à une prof modèle, qui applique les principes de laïcité, qui essaie d'inculquer à son collège TOUT ENTIER (et pas seulement ses élèves, parce que tu comprends, sauf sa collègue gentille, tout le monde est contre elle). Son seul défaut, c'est sa dépression. Ce qui en fait? Oui, toi au fond? OUI MERCI UNE PUTAIN DE VICTIME. Et n'essayez pas de me citer comme explication sa propre phrase "ce n'est pas parce qu'on est victime qu'on ne peut pas être bourreau" pour contrer ce que je vais dire, c'est inutile. On nous dépeint ici une putain de victime non pas d'une société, mais d'une série de clichés incarnés en êtres humains, qui n'ont aucune profondeur, aucun relief : le salaud est un salaud, le mec bien est un mec bien. Et c'est tout. On ne sait jamais, le spectateur moyen pourrait ne pas comprendre que le mec qui filme une nana en train de se faire violer est le méchant, faudrait pas qu'il ait l'air humain.
J'aurais encore des milliers de choses à dire, en désordre, là dessus. Alors je vais juste arrêter sur une sorte de résumé : personnages clichés, aucune réflexion, pseudo féminisme (rendu problématique par le traitement donné par le réalisateur), aucune profondeur, scénario qui finalement est juste du spectaculaire, et ne donne aucune matière à la réflexion et au changement, et qui semble finalement plus proche d'amener de l'eau au moulin de la haine raciale qu'autre chose, vide, vide vide.
J'aimerais mettre plus, par l'effort d'aborder des thèmes qu'il faut aborder de nos jours. Mais c'est tellement mal fait, finalement, ça aboutit tellement à l'inverse de qu'on pourrait vouloir d'un film de ce genre, sur un sujet aussi important que notre avenir (car oui, l'école des enfants, c'est NOTRE futur à tous) que je m'y refuse. Même 1, c'est trop. Je suis furieuse, je suis dégoûtée, je suis triste.
Leenne
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le 23 oct. 2011

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