Mes souvenirs de cours magistraux de littérature médiévale à l’université ont affleuré lors du visionnage. Face à tous ces fabliaux, chansons de geste, sotie, lais, ballades, etc même torpeur, même cruel bâillement et surtout même constat : manque de profondeur, récits soporifiques, écriture grossière, grotesque.
Cependant l’histoire du film ne se déroule pas vraiment au Moyen-Âge, mais environ un siècle après sa supposée fin ; il n’en reste pas moins qu’un souffle médiéval le traverse. On y retrouve l’ambiance et l’inversion des valeurs propres au Carnaval, que le grand médiéviste Bakhtine a étudiée. Pas de fous ni de bouffons, mais femmes au pouvoir et hommes-dirigeants couards, moine cupide, ennemis devenant amis, envahisseurs bien accueillis, simulacre de mort et ruseur pris à son propre piège, maris cocus, nain et singes, grand banquet, alcool en quantité illimitée : tout cela situe le film dans une logique de bouleversement de sens et des formes, si bien que le film de guerre devient farce.
On peut penser aussi à Molière, lui aussi dramaturge récurrent de farces. Toutes les formes de comiques y sont : comique de situation avec par exemple le mari trompé, de mots dans les dialogues, de gestes avec les mains baladeuses des Espagnols et de caractère avec ces personnages très stéréotypés, les Belges en tête. En somme, rien de bien fin.
Avec certes des décors trompeurs colossaux pour l’époque et vraiment réussis, La Kermesse Héroïque manque sans aucun doute de relief.
5,5/10