Movie of Stars, are you shining just for me ?

Si vous allez voir La La Land, attendez-vous à vous prendre quelques claques. Rassurez-vous : les premières sont d’une douceur inégalable. C’est la dernière qui fait mal, lorsque, le film fini, vous sortez du cinéma et retournez à la réalité – qui, disons-le, paraît bien fade à côté des couleurs splendides de la comédie musicale – ; musique en tête, plein d’étoiles dans vos yeux juvéniles. Si vous allez voir La La Land, vous aurez envie d’y replonger.


L’énergique et joyeuse séquence d’ouverture du film de Damien Chazelle donne le La : tout spectateur est emporté – peut-être malgré lui, si le musical n’est pas sa tasse de thé, mais avec quel enthousiasme ! – dans les pas d’une merveilleuse chorégraphie.


Grâce à sa mise en scène, le film ne s’essouffle jamais. Tout se déroule comme un tapis merveilleux auquel on attribuerait sans rechigner le pouvoir de voler. Les musiques et les danses, où flottent des robes légères et colorées comme des fleurs, procurent au film une dimension achronique : Chazelle rend hommage, d’abord, à un genre cinématographique dont l’âge d’or est un lointain souvenir mais n’omet pas d’en bouleverser les codes et de le moderniser. John Legend cristallise d’ailleurs la réflexion du réalisateur lorsqu’il demande à Sebastian (Ryan Gosling) comment ce dernier peut vénérer des musiciens qui ont révolutionné le jazz tout en étant traditionaliste. Le deuxième hommage que rend Chazelle, c’est, vous l’aurez compris, à une musique qui a connu son âge d’or à la même époque : le jazz. Pour le reste, Sebastian, qui explique à Mia (Emma Stone) que le free-jazz est une musique qui évolue et se renouvèle sans cesse, rejoint finalement le groupe mené par John Legend, The Messengers, dont le nom n’est pas anodin. De même que le jazz ne se meurt finalement pas, contrairement à ce que pensait Sebastian et au vu du succès du groupe, la comédie musicale n’est pas un genre désuet et Damien Chazelle lui confère un nouveau souffle. L’analogie entre jazz et comédie musicale met en lumière le discours du cinéaste sur le cinéma, qui est semblable au discours sur le jazz porté par Les Messagers : La La Land n’est pas un film de nostalgique mais une production tournée vers l’avenir.


Entre l’incandescence des lumières et celle des couleurs, entre les décors en carton-pâte ou les décors de studio, entre le factice et le réel, vous trouverez forcément le moyen de vous immiscer entre Mia et Sebastian, de faire part avec le rêve et de tomber amoureux avec eux (ou de tomber amoureux d’eux mais ça, ça ne regarde que vous…). Si la performance de Ryan Gosling a de légers défauts, ils sont invisibles tant ils participent au charme du protagoniste et pardonnés par ses talents de pianiste. L’acteur, en tant que musicien, n’en est d’ailleurs pas à son coup d’essai. En 2009, il sortait avec son groupe d’indie folk un premier (et dernier ?) album éponyme de qualité : Dead Man’s Bones. Emma Stone, en revanche, est parfaite dans ce rôle qui lui semble taillé sur mesure. Trois ans après Birdman (Iñárritu), dans lequel elle interprétait la fille d’un acteur à la gloire passée qui remonte sur les planches, Emma Stone incarne à son tour une comédienne qui peine à se faire un nom. Mais, par un habile jeu de lumières, Chazelle isole les deux amants du reste du monde dans de nombreuses scènes : ils sont seuls dans ce Los Angeles idyllique, brillant l’un pour l’autre sous les projecteurs, mis en scène, véritablement, et élégants.


La La Land n’est pas seulement une danse ou une chorale à laquelle on assisterait, c’est une ronde à laquelle on prend part, c’est un rêve qui ne laisse pas indifférent pour peu que l’on accepte de le vivre.

Menulis
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le 26 janv. 2017

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