La La Land réenchante le cinéma ! Evidemment, c'est le titre d'un quotidien, sans nuances, pas faux mais tellement réducteur car le film de Damien Chazelle n'a rien d'un tour de magie, il est bien plus profond et finalement sombre (pas seulement, on est bien d'accord). Rembobinons. Après le formidable Whiplash (au fait qui a vu Guys and Madeline on a Park Bench, le premier essai de Chazelle ?), La La Land pose un pied et même deux au pays des comédies musicales. Mais ce serait abusif que de le considérer comme appartenant totalement à ce genre. Ce qui frappe, passée l'ouverture effectivement emballante, c'est dans un premier temps la modestie du propos. Une histoire d'amour et de miroir aux alouettes puisque située dans la Cité des rêves. Il y a un certain réalisme social aussi dans le film qui l'apparente à un Demy (idole du cinéaste) autant qu'à un Minnelli et citer Bob Fosse n'est pas complètement hors sujet. Bref, si l'aspect musical est bien présent, ce n'est pas à la manière ostentatoire d'un Baz Luhrmann. Rien à voir, l'esthétique toc de l'australien n'est ici pas de mise. Les scènes s'étirent et l'émotion n'est pas vraiment au rendez-vous dans la première moitié de La La Land. En revanche les dialogues crépitent et il est évident que l'alchimie fonctionne entre Ryan Gosling, nouvel Errol Flynn (il ferait fureur dans un remake de Robin des Bois) d'une élégance rare et Emma Stone, pas le prototype de la star hollywoodienne, plus charmante que belle, mais douée d'une profondeur de jeu remarquable. Et puis la piste sonore qui tient lieu de fil rouge est surprenante : c'est le jazz qui domine avec quelques romantiques envolées quand même. All that Jazz ! Attendez, ce n'est pas terminé. Le meilleur est pour la fin, littéralement sublime de mélancolie avec son dénouement à deux vitesses. Là, il y a des sentiments et une émotion dans l'air, des volutes de romantisme qui se fracassent sur le comptoir de la réalité. Là, on peut parler d'enchantement. Là, on peut dire que si La La Land ne récolte pas une brassée d'Oscars, c'est à n'y rien comprendre. Les spectateurs applaudissent dans la salle quand le bon vieux The End s'inscrit sur l'écran. Chapeau, les artistes ! C'est formidable, parfois, le cinéma.