Dès 2010, Damien Chazelle avait écrit le scénario de "La La Land", avec la volonté claire de réaliser une comédie musicale jazzy à l'ancienne. Il lui faudra le succès de son premier long-métrage, l'oppressant "Whiplash", pour convaincre les studios de financer ce projet audacieux. Chazelle s'appuiera alors grandement sur son fidèle compositeur (et ancien coloc étudiant) Justin Hurwitz.
La suite, on la connait. Le film fit grand bruit en 2016/2017, décrochant une tripotée de récompenses. Et obtenant un très beau succès public, avec près de 450 millions de dollars de recettes, pour un budget de seulement 30.
Ce qui était vu à l'époque comme une rampe de lancement constitue pourtant rétrospectivement l'apogée commercial de la carrière de Damien Chazelle. Car à l'heure où j'écris ces lignes, ses deux films suivants ont sévèrement bidé au box office. Alors que paradoxalement, pour moi "La La Land" est son moins bon film (et oui, je ne suis pas amateur de comédies musicales !). Cela témoigne de l'énorme talent de son réalisateur, quand on voit les qualités de "La La Land".
On y suit une serveuse cherchant à percer à Hollywood, qui fait la rencontre d'un pianiste de jazz au fond du trou. Tout deux sont déterminés à accomplir leur rêve, et vivront une poignante histoire d'amour.
Le film démarre sur les chapeaux de roue. Avec une scène d'introduction endiablée en forme de plan séquence, qui dévoile un ballet d'automobilistes au sein des bouchons de Los Angeles, alors que la caméra virevolte autour des voitures. Puis l'ensemble enchaîne les séquences musicales, fluides, vives et très colorées. Dans un format très étiré, rendant clairement hommage à l'âge d'or hollywoodien ("Singin' in the Rain", "An American in Paris"...). Mais pas que, "Les Demoiselles de Rochefort" étant également référencé.
La photographie est très belle, exploitant les couleurs primaires des décors et costumes, et les jolis paysages de Los Angeles. Ou, à l'occasion, s'essayant à des jeux de projecteurs. Tandis que la réalisation de Chazelle est inspirée et énergique. Je dirais qu'il y a bien quelques CGI un peu voyants, mais franchement c'est du pinaillage au vu du budget.
Le tandem principal Emma Stone / Ryan Gosling est attachant et touchant. Elle est une aspirante actrice qui rame, et commence à perdre la foi (ses auditions catastrophiques sentent le vécu !). Lui est un grand amateur de jazz traditionnel, ulcéré que plus personne n'apprécie ce style, et qui refuse de s'adapter à la musique moderne. Difficile de ne pas imaginer que Damien Chazelle, grand amateur de jazz et de cinéma, et qui a conçu ce film comme un hommage à ses passions, n'ait pas mis une part de lui-même dans ce personnage.
Si leur histoire d'amour parait simple, elle évite les banalités des comédies romantiques (pas de second rôle comique par exemple), et se veut parfois tristement réaliste.
Un bel hommage à l'âge d'or des comédies musicales, et une belle prise de risque.