Sur un sujet aussi brûlant et aussi dur que la machine à broyer les hommes et les affects que sont les centre commerciaux, le réalisateur est parvenu à faire un film calme, placide. Presque serein. Par la grâce de Vincent Lindon, qui observe et absorbe les évènements et tribulations de ses semblables, qui réagit plus qu'il n'agit. Par ses rencontres avec le conseiller de pôle emploi, sa banquière, le proviseur du lycée de son fils, le prof de danse, se dessine en creux... comme un monde à part. Le public dans la salle riait à certains moments, quand la banquière essai de vendre une assurance vie, et clairement joue un mauvais rôle. Et à d'autres on est presque hypnotisés. Par ces caméras de surveillances dans le magasin, qui nous font croire que quinconque fait ses courses devient un voleur en puissance.
La puissance de ce film est dans le temps que le réalisateur prend. Il prend du temps pour chaque scènes, sans enlever quoique ce soit qui donnerait plus de rythme, mais y ferait perdre une certaine authenticité. Or c'est bien cela qu'il cherchait en confrontant Vincent Lindon à des gens ordinaires, dans leur propres rôles. Une vraie banquière pour interpréter la banquière, un vrai conseiller pole emploi, un vrai prof de danse dont on finit par se demander si il n'aurait pas le béguin pour Vincent... C'est presque de la contemplation, loin de l'agitation des débats pour mesurer ce que l'on laisse de soi, de son humanité et de son envie d'aller vers l'autre, quand on accepte le moule d'un système.