J'ai revu certains extraits de ce film, qui m'a particulièrement terrorisé quand j'avais 12 ans. En voyant tout ça, on comprend que ce film est une vraie oeuvre d'art contemporaine qui développe de larges idées:
Tout d'abord, la transformation. Il s'agit d'une métamorphose lente, subtile, précise. On y assiste avec dégoût, en perdant peu à peu l’empathie pour Seth, puisqu’il se perd peu à peu lui-même. Ce qu’il pense, on commence à ne plus le comprendre, et très vite il agit comme une bête, puissante, énergique, pulsionnelle : une mouche de 1.90 m pour 80 kg, en somme. La métamorphose dans ce film est trash, gore, totalement atroce ( arrache les ongles, perd ces oreilles...) , alors les dix dernières minutes, c'est un feu d'artifice de dégueulasse. Car il faut avouer, l'homme et les insectes sont très éloignés biologiquement, donc il est vrai que, déjà, on à un certain dégoût quand on lit le synopsis sans même voir le film, un homme se transformant peu à peu en une créature entre l'homme et la mouche (à vomir non ?). Mais alors, pourquoi ce film, pour la plupart des gens, fut un énorme traumatisme (tout comme moi d’ailleurs) ? Déjà, je sais que c'est un film interdit aux moins de 12 ans, hors on devrait l'interdire aux enfants ayant 12 ans. Parce que tout simplement, c'est à cette âge où en moyenne, on rentre dans la puberté et donc, on voit notre corps changer à une vitesse incroyable, une véritable métamorphose entre deux photos de classe d'une seule année d'écart ( en plus, quand j'ai vu ce film pour la première fois, j'avais encore des dents qui bougeaient, imaginez un peu de perdre ses dernières avec ce film en tête). Aussi, ce qui nous marque dans "La Mouche", c'est le jeu d'acteur, qui est excellent, Jeff Goldblum et Geena Davis, deux grand acteurs qui nous montrent une sorte de "Belle et la Bête à l'envers " ou encore une "Belle et la Bête à retardement". Car c'est vrai, comme expliqué précédemment, cette métamorphose changera entièrement l'ambiance du film, à telle point qu'il voudra sacrifié sa petite amie, pour retrouver un aspect humain, à ce stade l'amour n'est plus présent dans son esprit, et que cet insecte a vraiment pris totalement le dessus sur lui. Et ce duo d'acteur, nous rend un film entièrement fictif (la téléportation, la métamorphose de l'homme en insecte...), en quelque chose de méchamment très réaliste, et je pense que c'est un des points, avec bien sûr le gore organique, qui nous marque dans ce film. Mais ça, je dirais, on l'a remarqué.
J'aimerais par là, dégager un point qui m'a sauté dessus comme un facehugger en plein visage, et à côté duquel sont passées beaucoup d'analyses de ce film. Alors là, prêtez-moi l'oreille ( plaisanterie de mauvais goût). Tout d'abord la place de la machine dans ce film est un véritable message. La machine, et pas n'importe laquelle, celle qui permet la téléportation (qui est la métaphore de la technologie la plus au top), cette machine va alors être entièrement responsable de cette transformation à l’extrême de l'homme vers la mouche. Ce qui signifie que la machine, qui est là pour nous faciliter la tâche, va au contraire nous réduire à l'état d'insecte, mais pas n'importe lequel, la mouche, l'insecte le plus infâme, le plus repoussant, qui se nourrit de nos excréments et des cadavres. Si vous connaissez la série youtube, le fossoyeur de film, François Theurel, en dissertant sur la notion de remake (épisode les bons remakes), imagine un film semblable à l'ancienne version de 1958, avec pour différence un monstre hybridé avec une guêpe. Or si cela avait été ainsi, le film n'aurait pas eu le même sens. Car la guêpe est un insecte qui vie en société, possède une reine, des ouvriers ,des guerriers, ce qui n'est pas le cas de la mouche. Et ici, Cronenberg nous décrit une satyre, qui nous montre que la machine va être la cause de la dégradation totale de ce qui caractérise l'humanité. Par exemple, l'invention d'Internet, une opportunité fantastique, des bibliothèques en ligne, des forums de communication... Et tout ça, quelques années après devient un objet de compulsion, par les jeux vidéo, les clips de merde, les émissions de télé-réalité, ou même pire encore, le fait qu'internet soit la principale cause de suicide chez les moins de 14 ans par le cyber-harcèlement sur les résaux-sociaux. Parce que le cauchemar de Véronica sur l'accouchement d'une larve, nous pousse plus loin encore, car la progéniture ne naît même plus à forme humaine. Or "on ne naît pas homme mais on le devient", mais là, cette technologie qui est à la porté de n'importe qui va alors transformer les générations jusqu'à les rendre complètement inhumaines. Par ailleurs, la toute dernière minute nous montre que Seth fusionne avec sa machine, et devient une sorte d'aberration vivante qui aboutira à son suicide, et ce qui se passe aujourd'hui est un bel écho de cette image : des appareils intelligents deviennent des parts intégrantes de notre corps, se substituant à nous dans de plus en plus de tâches quotidiennes. Or comme dit Heidegger: "la main est l'organe de la pensée", donc avec l'arrivée du numérique, d'internet, des smartphones..., cela montre que la machine nous domine, et réfléchit à notre place. Un peu comme Seth se nourrit en vomissant des sucs gastriques sur ses aliments, on ne digère plus les informations, on n'a de moins en moins de critique envers ce qui se passe.
Comme dit un vieux proverbe: "mille milliards de mouches ne peuvent se tromper: manger de la merde".