D'emblée, on se doute de la direction que le film va aborder : les premières phrases en introduction spoilent le dénouement, mais on peut également s'en douter lorsque les premières images du film se dévoilent à nous.
On y voit, Yohan, policier de la PJ qui fait des tours et des tours en vélo dans un vélodrome de Grenoble. Cette image, qui reviendra souvent au cours du film illustre bien le destin de cette enquête : elle tourne et tournera inexorablement en rond.
Mais l'intérêt du film n'est pas vraiment là. L'intérêt se trouve dans le message que le film véhicule : il n'y a pas de coupable identifié pour le féminicide. Tous les hommes interrogés par la PJ auraient pu tuer Clara, avaient un mobile aux yeux de la police, avaient des comportements suspects. Et pour autant, le coupable ne se trouve pas parmi eux.
La beauté cruelle de ce film se résume dans ceci : Tous sont des potentiels coupables, des potentiels meurtriers, et pour autant ce ne sont pas eux. Il en va de même avec les féminicides : il peut s'agir de conjoints, d'ex-conjoints, mais aussi de personnes inconnues, d'hommes croisés au détour d'une rue.
Le point commun avec tout ça, c'est la misogynie : tous les exs de Clara sont d'affreux misogynes dont les phrases sur la victime ont de quoi faire s'hérisser les poils d'indignation, mais ne sont pas coupables. Et on pourrait parfois croire qu'ils le sont, puisque le point de départ d'un féminicide c'est la misogynie.
On pourrait avoir l'impression que le film veut parfois trop s'appuyer sur la vie privée et intime de Clara, et peut avoir tendance à la dépeindre comme la classique jeune femme de peu de vertu qui couche à droite à gauche avec des mecs en couple ou non. Cette critique se retrouvera même succinctement à la bouche d'un des policiers avant que ce dernier ne se fasse reprendre aussitôt par Yohan. Il est vrai qu'on ne s'attardera sur le passé de Clara que de cette manière, et c'est peut-être le seul point de redondance que je peux trouver dans ce film.
Mais cet étalement dans la vie privée de la victime a ceci d'utile qu'il sert à illustrer la misogynie patente de ses exs et peut nous faire croire quelques minutes à leur culpabilité.
La Nuit du 12 est donc un film qui m'a marqué par la fragilité émotionnelle de certains personnages (comme Marceau, ce policier qui aime réciter du Verlaine et qui ne supporte plus son quotidien ou Yohan, qui tout en silence et en apparente froideur est sans doute la troisième victime de ce féminicide puisque ce meurtre continuera de le bouffer) sur une histoire morbide et sans dénouement.