Alors certes, avec " The Man from Colorado " nous ne sommes pas en présence d'un des classiques incontournables du genre mais néanmoins cela reste une oeuvre d'honnête facture réalisée par un réalisateur qui ne l'est pas moins (et dont le sommet de sa carrière sera " Voyage au centre de la Terre ": Henry Levin. Ce dernier ne se contente pas de nous raconter une classique histoire d'amitié qui, comme bien souvent, se termine mal, mais dresse le portrait psychologique d'un homme que la guerre n'a pas laissé indemne et décrit,plus généralement, une partie de la société qui se trouve fort dépourvue une fois la paix venue!
Cet homme c'est Owen Devereaux(interprété par Glen Ford qui en est dans sa première partie de carrière et dont ce sera loin d'être l'unique collaboration avec Henry Levin), colonel nordiste de son état qui est considéré comme un véritable héros de guerre et promis à un bel avenir politique! En effet, le poste de juge de paix de sa ville lui est réservé! Seulement voilà, sous ses airs de gendre idéal, il suffit de creuser un peu pour voir que cela va être un peu plus compliqué que ça! Il semblerait que le bonhomme, durant cette guerre fratricide, ait pris un malin plaisir à faire couler le sang! Ce qui pourrait expliquer, en scène d'ouverture, le massacre d'un bataillon ennemi alors que le drapeau blanc était hissé depuis un certains moment! Classe le mec! Abattre, en pleine rue, un homme désarmé ne lui fait pas peur non plus! Bon certes, le mort menaçait de révéler son terrible secret mais quand même.....Henry Levin nous propose donc ici un portrait d'un homme rigide et psychologiquement instable qui soulage sa conscience en se confiant dans son journal intime! Un homme impulsif qui s'enfonce de plus en plus dans sa folie et qui n'hésitera même plus à s'arranger avec la vérité du moment que cela lui donne raison! Un seul homme prends la pleine mesure de la mégalomanie du colonel, Del Stewart (interprété par l'impeccable William Holden chez qui je ne peux m'empêcher de trouver un charisme certain!), son ami de toujours et accessoirement son capitaine! Un vrai ami, celui-ci, qui n'hésite pas dans un premier temps à couvrir son colonel....
En fond social de cette histoire, le réalisateur met en évidence le dur retour à la société civile d'hommes qui ont sacrifié quelques années de leur vie pour défendre leur patrie, cette même patrie, qui a travers le jugement d'un tribunal, les prive de leurs parcelles minières au profit des hommes d'affaires restant loin, bien loin du front! Ces hommes qui, ironie du sort, se retrouvent condamnés à travailler sur ce qui était leur propre bien avant la guerre! Puis se pose pour d'autres la question de comment gagner sa vie et qu'en faire surtout! Le syndrome Rambo quoi.... Cette violence des puissants envers le petit peuple justifie-t-elle la violence de ce dernier et autorise-t-elle de tomber dans l'illégalité comme le fait Jericho, ancien compagnon d'arme du Colonel! (toute ressemblance avec une situation actuelle serait fortuite, bien entendu....).
" La peine du talion " est donc un bon western, qui si il bénéficie d'un scénario dense et béton adapté d'une histoire originale de Borden Chase (et écrit par le binôme ** Robert D. Andrews** et Ben Maddow) souffre d'un réalisation, non pas mauvaise, mais sans éclat qui n'arrive pas à empêcher quelques baisses de régimes lors de ces 100mn! A cela s'ajoute la partition d'un Glen Ford que l'on a connu plus inspiré et qui a tendance à en faire un peu trop pour jouer la folie du Colonel! On a donc une oeuvre qui mérite d'être vue, plutôt noire et cynique et qui préfigure ce que genre va devenir dans les décennies suivantes, à savoir autre chose que simplement du pur divertissement!
Del Stewart (William Holden) : « Dites-moi docteur, la guerre pourrait-elle affecter un homme aussi bien qu'Owen au point qu'il ne puisse plus s'arrêter de tuer ? »
Doc Merriam (Edgar Buchanan) : « La guerre affecte les hommes de bien des façons différentes. Du temps ! Les hommes ont besoin de temps après la guerre ; et d'un entourage qui les aime et ait confiance en eux. »