C'est peu dire que la promesse du pitch "marxiste" (le droit des pauvres au luxe et à l'art, incarné par une aide-soignante dévouée qui vole parfois ses clients) n'est pas tenue. Pas de dialectique ici, pas de contradictions mais une insupportable mièvrerie, où toute la portée politique est rabattue sur une commisération répugnante - ah la pauvre petite dame, elle n'est pas méchante. Qu'il est loin le temps de MARIE-JO ET SES DEUX AMOURS ou LES NEIGES DU KILIMANDJARO... Guédiguian a 71 ans, ne serait-il pas temps de prendre sa retraite plutôt que de s'adonner à une plaidoirie aussi rance et pittoresque en faveur des démunis ? Le comble est que le personnage est abandonné à mi-récit. De son parcours intérieur, de son déchirement une fois qu'elle est accusée, on ne verra quasiment rien (une scène où elle se cache chez elle, avec Gérard Meylan qui est le seul à sauver les meubles). Il faut qu'on s'intéresse à une histoire d'amour complètement improbable entre leur fille et le fils (Leprince-Ringuet) d'un des clients spoliés. Et là c'est peu dire que le film sombre dans un ridicule embarrassant, entre dialogues grotesques (il faut savoir filmer une actrice qui crie "je veux ta bite"...), clichés de roman-photo (ils se baignent tout habillés dans une piscine), en mode passion irrépressible. Leprince-Ringuet, particulièrement mauvais, est celui qui prend le plus le cher mais son personnage est très chargé (le méchant agent immobilier tiré à quatre épingles avec barbe so 2025). En fait tous les acteurs sont mal dirigés, on dirait un mauvais atelier théâtre en maison de retraite, sans parler des situations grotesques (la vieille qui attend au tramway son amour de jeunesse mort à la guerre... euh, elle est censée avoir quel âge ? Le temps ne passe pas chez Guédiguian vitrifié).

L'impression générale est surtout qu'on nous prend pour des cons : à la fin, le client spolié (Darroussin) retire sa plainte... et devient le mécène de la pauvre famille, car il aime l'art, et il aime Ascaride (mais rien à craindre il est en fauteuil roulant). Le petit-fils prodige de celle-ci ne gagnera pas le concours de piano, mais arrivera second : le côté conte - que Guédiguian affiche comme un paravent à sa naïveté - n'est même pas assumé, mais un brin d'espoir persiste. Brin d'espoir, c'est tout ce qui reste aux pauvres, ils peuvent bien se torcher avec, le film préfère finir en mode Plus Belle la vie sur l'attendrissement béat de soi-même et de son petit monde clos et fatigué. Un mélange de cynisme et de gâtisme.

LunaParke
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