"La Planète des Singes" de 1967 est une adaptation revue et corrigée du roman de Pierre Boulle (1963). On retrouve certes dans le film certaines bases présentes dans le livre comme bien sûr l'idée d'une planète inconnue aux caractéristiques quasiment identiques à la Terre, à un "détail" près: sur cette planète, les humains privés de langage articulé sont un gibier que traquent les simiens. Dans le livre nous sommes en 2500 dans le film en 3978. Le postulat de départ n'est pas exactement le même puisque dans le livre, deux personnages nommés Jinn et Phyllis passent des vacances dans l'espace lorsqu'ils découvrent un bouteille flottant dans le cosmos, celle-ci contient un manuscrit écrit en langage de la Terre, dans lequel Ulysse Mérou narre son étrange aventure spatiale du côté de Bételgeuse. Ce testament est une mise en garde jeté dans l'espace pour alerter l'humanité du danger qui la guette. On apprend plus tard que Phyllis et Jinn sont deux singes.
Dans le film, il n'y a pas de singes astronautes ou de civilisation simienne très avancée en matière de technologie (manque de moyens financiers et mise en image impossible à réaliser en 1967 avec les techniques de l'époque). Franklin J. Schaffner s'appuie donc sur le scénario solide de Ron Serling et Michael Wilson, la musique étrange et fascinante de Jerry Goldsmith, les maquillages saisissants de John Chambers, le charisme de Charlton Heston et enfin son sens aigu de la mise en scène, du cadrage et du choix des décors naturels - le désert américain recèle des trésors géologiques propres à enflammer notre imagination - pour mettre en image cette relecture du roman français.
Le conte philosophique de Pierre Boulle devient un film-pamphlet sur la place de l'Homme dans l'évolution et la menace qu'il représente pour la survie de la planète (sujet hélas d'actualité encore aujourd'hui), ici au travers de sa puissance de feu: l'arme atomique symbole de fin du monde.
Le film a très bien vieilli, il reste toujours aussi distrayant et incite à la réflexion sans être trop pesant. Toutes les suites ne lui arriveront pas à la cheville même les versions plus récentes: celle de Burton en 2001 décevante et les films de 2011 et 2014 (dont la qualité est redevable surtout à la prouesse technique du "motion capture" et des acteurs derrière les singes, c'est déjà pas si mal). Les derniers plans du film sont devenus au fil du temps iconiques: la découverte que fait George Taylor/C. Heston à la fin du métrage bouleverse toujours autant. Bien sûr on peut toujours ne pas être d'accord sur le partie pris de faire parler anglais les singes, n'oublions pas qu'il s'agit d'un film à grand spectacle pour le marché américain avant tout. Cette question, au vu de la qualité générale du film devient un détail.