En matière de science-fiction, tout semble avoir été déjà fait, puisque la grande majorité de ce qui sort en salles n'est qu'adaptations de nouvelles de Philip K. Dick, ou remakes de films vieux de 40 ans, voire plus, ou moins. La Fox a perdu la main sur les licences Marvel, et dans un élan de désespoir, elle pioche dans son catalogue Golden Age afin de nous proposer une line-up identique à celle qu'elle eut servi à nos parents ou grands-parents. En attendant donc La vie secrète de Walter Mitty, remake du film éponyme de 1947, voici celui de La Conquête de La Planète des Singes, datant quant à lui de 1972.
Guère différent de son ancêtre, celui-ci se concentre davantage sur l'aspect visuel que sur l'histoire proprement dit. Néanmoins, là où il se démarque, c'est par le place réduite qui est laissée à l'espèce humaine, dont notamment un Franco presque aussi parfait qu'il est plat. Ici tout n'est qu'exhibition de performance capture, et au bout des 100 minutes que comptent la bobine, on ne sait pas trop si l'on vient de voir un film ou une très longue démo technique. Weta Digital, le studio de post-production fondé par Peter Jackson, a globalement fait du bon boulot (ainsi que les autres agences qui ont participé, dont Halon, Pixel Liberation Front et Aaron Sims), et c'est d'ailleurs le pilier central du film, le tout étant égayé par des béquilles scénaristiques d'une profonde débilité, gorgées de messages édulcorés pour plaire au public qu'il vise, les 8-16 ans. Rick Jaffa et Amanda Silver, le couple de scénaristes, est absolument incapable de concevoir quelque chose d'adulte ou de réfléchi, sans pour autant ne pas être calculé. La machine a été pensée, développée et élaborée au millimètre près pour titiller la corde sensible d'un public jeune et varié, recyclant des messages tellement usés et laissés de côté depuis quelques décennies qu'aujourd'hui ils font l'effet d'une bombe pour ceux qui ont perdu leur virginité il n'y a encore que quelques étés.
Bref, La Planète des singes : les origines n'est pas un film d'action, ni un drame, ni un film de science-fiction; c'est une compilation, le genre que l'on vous sort en début d'été (ou vers la fin, quand on est pas trop sûr de la réception), avec quelques tubes et les trois quarts restants étants de la merde invendue. Histoire de faire chier le puriste qui aura eu la malchance de rentrer dans la salle, ils n'hésiteront pas à replacer la scène de La Planète des Singes de 68, où Charlton Heston s'écriait « c'est une maison de fous », mais en intervertissant les rôles, au cas où l'on n'ait toujours pas compris que le film était une métaphore sur le comportement de l'homme (et cela sans oublier le « NON ! » que prononcera César, mot qu'il proscrira ensuite dans l'épisode 5). En 40 ans d'évolution, le message colporté par la licence simiesque a atteint le fond des chiottes, tout comme Idiocracy l'avait prédit, et il est fort probable que le blockbuster de l'été 2050 soit La révolte des Télétubbies — ou un truc du genre. Ce nouvel opus n'a pas l'humour de Doux, dur et dingue, ni l'écologisme ou l'émotion de Gorilles dans la brume, ni l'actioner ou la critique politico/scientifique de L'armée des 12 singes, et évidemment pas l'essence d'un soupçon de zeste du film instigateur, et encore moins du livre de Pierre Boulle. Pendant 80 minutes le film se regarde le nombril, nous servant en boucle du Weta Porn et des phrases d'une connerie très post-2000 (« tu essaies de contrôler des choses qui ne sont pas censées l'être »), jusqu'à la remontée gastrique, avant de finalement balancer toute la sauce dans un final expédié si vite que l'on a l'impression que Durden a encore joué au con avec la bobine. Finalement on est content que ça soit fini, mais hélas non, Jaffa et Silver venaient de regarder l'intégrale des Marvel juste avant (ainsi que Green Lantern), et ils se sont dit que s'ils ne plaçaient pas un cliffhanger couillon, surtout après autant d'ennui, les gens ne voudraient pas en voir la suite. Merci, mais le virus colporté par un mec en avion qui détruit la race humaine on l'a déjà vu, ça s'appelait « L'armée des 12 singes ».
Pour conclure, le moviegoer de base qui se fait chier durant son mois d'août trouvera ce qu'il recherche, surtout si l'on tient compte de ce qu'offre actuellement la concurrence. Coup de bol, c'est pas trop long, et pour le puriste le supplice sera moins douloureux qu'un Brit milah, mais il n'en sortira hélas pas indemne.
Mention spéciale pour Weta, qui comme pour Avatar, s'occupe des effets-spéciaux, mais aussi du scénario, de la mise en scène, du montage, de l'interprétation, de l'éclairage, et peut-être même de la cantine, parce que visiblement, il n'y a qu'eux qui se sont bougés le cul.
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