Un film à l'esthétique et au propos marquant, quoi que mystérieux et manquant d'une fin digne de ce nom. On retrouve a priori des éléments des classiques de la littérature tels que Pantagruel (pas lu) ou Don Quichotte (pas lu). Le casting, peu étendu, est très bon. Le protagoniste au visage de mousquetaire renforce l'aspect archétypal de cette petite oeuvre cinglante.
Le sujet est celui de l'égoïsme, de tuer pour se nourrir, de la cruauté de l'univers. Des figures symboliques et liées à la diégèse (l'escargot lié au protagoniste, la tueuse et l'enfant) augmentent le mystère et l'interprétation quant à la présence de cette machine diabolique. Je regrette que rien ne soit dévoilé de cohérent sur les motivations de ceux qui l'animent.
Dommage pour la fin. J'aurais tellement aimé des tirades légendaires, une confrontation mythique, un deus ex machina des enfers.
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A noter quelques incohérences que j'ai remarquées :
Le plan de Goreng implique de rester sur la plateforme et de rationner la nourriture pour faire tomber le système. Or, un nombre indéterminé et variable de jours s'étalent avant que les prisonniers ne soient répartis, et la plateforme remonter une fois par jour. S'il s'agit de le faire une seule fois et de rester tout en bas, comment pourrait-il forcer qui que ce soit sur le long terme ? En admettant qu'il survive à la faim d'en bas, il n'a aucune garanti de se réveiller aux étages supérieurs lors de la répartition des prisonniers. S'il compte rester sur la plateforme pour remonter, la répartition hasardeuse reste un problème à long terme et en plus la vitesse de la plateforme implique une poussée qui tuerait n'importe quel individu s'y trouvant. Même chose lorsque son plan est modifié pour renvoyer un plat (la "panacotta") : en réalité les plats et ustensiles devraient être soumis à de fortes secousses et des turbulences, au risque d'être projetés et de se briser.
Une fois monté le plan avec son accolyte Baharat qu'il vient de rencontrer suite à la répartitions des prisonniers, tous deux montent sur la plateforme pour descendre l'intégralité de la tour, et se trouvent à l'étage du dessous. Baharat menance les occupants et leur dit qu'ils vont rationner et leur donner une part. Goreng décide que non, que "en haut on mange à sa faim", et que "ils commenceront au niveau 51". Baharat se plaint et lui dit "se sont mes amis", car il s'inquiète qu'ils vivent l'interdiction de manger comme une trahison. Ce qu'il faut comprendre, c'est que comme Goreng estime que les gens des premiers étages mangent souvent à leur faim, il vaut mieux répartir la nourriture plus équitablement. Ce qui est confirmé lorsqu'il précise qu'il veut les faire jeûner une fois sur deux. Or, les prisonniers viennent d'être répartis, ils n'ont donc pas pu encore manger. Si quelques jours s'étaient écoulés, alors oui ils ont pu manger plus que la ration personnelle et donc faire souffrir de faim les gens de tout en bas ; mais il est idiot de rompre le supposé jeûne une fois sur deux s'il mène à ce que les gens du bas en souffre à nouveau et jeûnent eux aussi : autant répartir la nourriture équitablement et s'éviter des calculs de compensation inutiles et des jalousies. Si son plan est de répartir la nourriture sur un nombre donné d'étages et ce sur une longue période, il vaut mieux simplement diviser la nourriture en autant d'étages qu'il y a. [Note : on peut considérer que cette erreur est une erreur humaine acceptable rendant le film plus réaliste].
Peu après être descendu de quelques niveaux et alors même qu'ils ne font que débuter leur périple, Baharat se tourne vers Goreng et lui dit "il y a plus d'étages que tu ne pensais". Or Goreng avait estimé le nombre d'étages à 250, et on peut confirmer qu'ils n'ont pas encore atteint le niveau 250 puisque peu après l'altercation qui leur coûte presque la vie, et tandis qu'ils s'enfoncent dans les niveaux infernaux où il n'y a plus à manger, on peut apercevoir sur un mur le nombre "148".