Les choix esthétiques (monochrome bleu turquoise, graphisme épuré justifié) sur ce court métrage le font d’emblée repérer ou sortir du lot. Cela correspond bien avec un contenu qui se révèle franchement hors normes.
Dans un immense building moderne, de nombreux employés de bureaux s’activent toute la journée (on remarque une salle immense où s’alignent les bureaux avec ordinateur). Le choix de ne dessiner les personnes que sous la forme de silhouettes à peine sexuées se justifie là aussi, car tous ces employés de bureaux font masse. Une masse travailleuse qui apprécie le toit-terrasse pour une pause de temps en temps.
C’est sur ce toit-terrasse qu’arrive l’impensable avec un accident qui pousse une personne vers une chute vertigineuse. Le film enchaine alors les péripéties, toutes plus ahurissantes les unes que les autres, permettant au réalisateur, le polonais Piotr Milczarek, de broder sur pas mal de tableaux.
Seul un super-héros pourrait empêcher le drame d’aller jusqu’à sa conclusion catastrophique. Oui, mais, même dans ce cas, le drame n’a pas fini de produire ses effets. Ainsi, lorsque les uns et les autres imaginent qu’il n’y a pas de réel danger, pourquoi ne pas en profiter pour se faire des sensations à peu de frais ? L’effet moutonnier joue à plein. Cela donne évidemment à réfléchir. A nous spectateurs bien évidemment, mais également au super-héros…
Bien évidemment, ce film exploite une situation extrême. On pourrait toujours avancer que dans la vie, tout ne se passerait pas ainsi. De toute façon, dans la vie, on ne rencontre pas de super-héros. Le film surprend en cassant le mythe des super-héros qui réussissent toujours à sauver le monde de la catastrophe, grâce à leurs super-pouvoirs. On remarquera que le super-pouvoir en question n’est absolument pas la cause du désastre annoncé par le film, puisque notre super-héros fait vraiment l’impossible pour empêcher le drame. Ce qui est en cause, c’est bien la mentalité humaine, avec cette façon qu’ont les uns et les autres de suivre quelques-uns et de profiter de la situation. Y a-t-il un moyen de lutter contre cette bêtise humaine ? On peut toujours imaginer que le pouvoir du cinéma soit supérieur à celui de notre super-héros.
En 5 minutes, ce court métrage donne à voir et à réfléchir de manière intelligente, avec provocation et des surprises choc qui s’enchainent, façon humour noir. Et le choix de l’animation permet ici des effets intéressants en toute simplicité.