"Dieu a créé la femme pour qu'elle se marie."
Samira Mahkmalbaf n'a que 17 ans lorsqu'elle réalise La Pomme, film mi documentaire, mi fiction, adaptation d'un fait divers survenu à Téhéran dans les années 1990.
Deux fillettes, enfermées par leurs parents depuis leur naissance, privée de parole et d'éducation, vont retrouver leur liberté dans les rues de la ville et découvrir les choses simples de la vie (jouer à la marelle, goûter une glace, voir leurs reflets dans un miroir).
Là où la fiction va dépasser la réalité dans le film de Samira Mahkmalbaf c'est que la réalisatrice va se servir de ces faits pour tisser une superbe métaphore du goût de la liberté par la présence de cette pomme, suspendue à un bout de ficelle et agitée sous le nez des deux fillettes tel un pompom dans un manège.
Plus le film avance, plus elles ont de pommes dans les mains.
Cette métaphore, très belle et très forte lorsque l'on considère la condition de la femme en Iran, n'est que plus émouvante lorsqu'elle touche, dans une magnifique scène finale, la mère des enfants, fantôme désincarné sous sa multitude de voiles.
La pomme se jouera d'elle un moment avant qu'elle n'ose l'attraper.
Ce film est donc superbe, non pas comme objet cinématographique pur, bien que la réalisation, douce et lente, soit agréable, mais comme oeuvre à prendre dans toute l'ampleur de son environnement social et politique.
Tels les films de Jafar Panahi, la vie est dépeinte sans misérabilisme (propre souvent au cinéma occidental) mais dans toute sa spontanéité et sa réalité. Cela surprend d'autant plus que cette culture, cette ambiance de vie, ne nous sont pas forcément familières.
Un film essentiel donc pour nous, occidentaux, afin de comprendre un peu mieux la complexité de la vie en Iran, notamment pour la femme.