Fresque américaine grandiose, on retrouve certains des grands thèmes abordés dans The Deer Hunter : la place des immigrés et du sang qu’ils versent pour la nation américaine, et la violence intrinsèque à la construction de cette dernière, les triangles amoureux-amitiés. A la différence de The Deer Hunter où l’on restait plus ou moins dans le même monde, celui des classes populaires et immigrées, Cimino applique ici une grille plus sociale avec la cynique domination d’une classe supérieure, élitiste, dont il est dit au début qu’elle doit « cultiver » les classes incultes pour faire progresser la nation. Au coeur de tout, la propriété (du bétail en l’occurrence) et la loi du plus fort, et donc de ceux qui possèdent.
A cela s’ajoute une autre dimension sociale, administrative et structurelle : les puissants ont la Loi de leur côté, puisque ceux qui la font sont eux-même de leur classe. L’utilisation du terme « citizen » pour nommer parfois les simples gens, s’oppose aux dénominations de ceux de l’Association (association des propriétaires), ou même du Gouverneur et du Président, et ironise sur les droits qu’ils devraient leur être induit. La Loi qui justifiera leur massacre et leur enlèvera ce même droit.
Le personnage de James mettra le point final à l’ironie, lors d’une scène finale ambiguë (comme dans The Deer Hunter).
Oeuvre magistrale, filmée d’une manière éblouissante, où les tableaux de maîtres succèdent aux fêtes enfiévrées (Cimino a cet art de mettre en scène les grandes fêtes, ou les grandes scènes « collectives ») ou aux scènes intimistes, Cimino a le pouvoir de faire ressentir au spectateur chaque sentiment, on frémit d’allégresse, on agonise dans la rigueur, on subit la violence et on est attendrit par un geste d’amour. Du cinéma !