Plus qu'un grand western, un grand film !
« La Poursuite infernale » n'est pas seulement un excellent John Ford. C'est avant tout un grand moment de cinéma, faisant la part belle aux morceaux de bravoure. C'est l'histoire d'un cow-boy se faisant shérif pour venger la mort de son frère et le vol de son bétail : le célèbre Wyatt Earp. Mais l'histoire ne s'arrête pas là : ce film regorge de seconds rôles extraordinaires, en commençant par le mystérieux Doc Holliday, homme tourmenté mi-gentleman mi-brute épaisse, en passant par l'aguicheuse Chihuahua et celle qui donne son nom au titre original du long métrage : la belle Clémentine, courageuse fiancée de Doc Holliday. Un foisonnement de seconds rôles (caractéristique du cinéma de Ford) des plus réjouissants. Certes, oui, comme l'indique Télérama, « La Poursuite infernale » est un western crépusculaire. C'est l'histoire d'un meurtre presque biblique, d'une quête sans fin, de la foi dans une justice qui vient réparer l'affront et punir le malfaiteur, mais qui reste humaine (Earp ne veut pas tuer l'assassin mais le mettre derrière les verrous pour le juger). C'est la confrontation entre la loi et l'ordre de la civilisation face à la barbarie de l'Ouest. Toutefois, John Ford ne donne pas à son film une orientation uni-dimensionnelle. Comme le titre original le laisse supposer, « My Darling Clementine » est aussi une histoire d'amour, et un instantané de la vie quotidienne dans l'Ouest américain, qu'il soit question de se faire raser chez le barbier (avec beaucoup d'humour) ou d'inaugurer une église, le temps d'une danse endiablée. Comme d'habitude chez Ford, on ne compte plus les séquences inoubliables, et ces moments de tension filmés avec trois fois rien, mais d'une force tellurique : la séquence du jeu de poker, du verre de champagne, de la tirade shakespearienne de l'acteur de théâtre, etc. etc. Et comme toujours, l'interprétation est parfaite. Henry Fonda est magistral en Wyatt Earp, tout comme Victor Mature en Doc Holiday. Mais tous les autres acteurs, du moindre frère Earp au violoniste à moustache, en passant par le barman, sont géniaux. « La Poursuite infernale », s'il n'est pas l'un des tous meilleurs Ford (encore que), n'en reste donc pas moins un grand film, réalisé de main de maître (et le mot n'est pas galvaudé).