Jasna & Gérard
Entre cadrage pourri, scénario nullissime & jeu d'acteur totalement incongru, Princh'hesse Jasna nous offre un moment d'incompréhension totale rythmé par les secousses d'un rire irrépressible. De...
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le 21 nov. 2010
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Un peu hâtivement présenté comme “un pur film d’héroique (sic) fantasy dans la lignée de Willow et Conan le Barbare” dans l’édition en DVD d’Evidis, La Princesse Jasna est avant tout une adaptation, celle d’un conte de Jan Drda. Né en en 1915, mort en 1970, l’auteur a été journaliste, politicien, écrivain ou scénariste de films, c’est une figure importante de la culture tchèque du XXième siècle. Quant au réalisateur, Zdeněk Troška, il a réalisé un certain nombre de films, dont beaucoup d’adaptations de conte de fées.
Il est donc assez excitant de découvrir ce film, qui aura réussi à quitter les frontières tchèques.
La fée du soleil demande audience au roi, elle exige réparation pour son coq tué par une sorcière. Sans coq, le soleil ne peut plus se lever, puisqu’il attend son chant. La sorcière n’en peut plus elle de ce volatile, elle qui vit la nuit et est réveillé par son cri. Un peu embêté, mais devant faire justice, le roi approuve la fée du soleil. Le coq renait, et peut enfin lever la nuit qui s’était abattue.
La sorcière, accompagnée de son enfant, n’apprécie guère ce choix. Elle lance une malédiction au souverain : sa fille ne pourra épouser qu’un savetier. Il en est hors de question pour le roi, qui décide de l’enfermer dans une tour de son château. Sa situation est alors connue par un habile savetier de passage, qui va alors la délivrer, mais les sorcières ne les laisseront pas tranquilles.
Nos contes de fées ne sont pas connus pour leur féminisme car les leçons de morale qu’ils offrent proviennent d’un autre temps. Le conte de Jan Drda et cette adaptation s'inscrivent dans cette vision un peu désuète. La Princesse Jasna est au centre de toutes les attentions, mais ce n'est pas en tant que sujet de l’action. Emmenée d’un endroit à l’autre, c’est à peine si elle regrette son sort, elle a beau pleurer quelques larmes, elle s’accommode assez bien de son séjour dans la tour ou du mariage princier qui sera prévu plus tard. Michaela Kuklová est pourtant une belle jeune femme, une brunette dont le regard décidé et une certaine posture lui offrent une certaine modernité, un physique mal exploité par le film qui en fait donc une femme un peu trop effacée.
L’académisme de la morale étant annoncé, c’est sur d’autres registres que se situe le film, qui se veut enchanteur et assez léger. Les personnages sont réduits à quelques traits de caractère, le roi est gentil mais faible, le savetier est beau, gentil et courageux, les sorcières en font des tonnes, sans aucune gravité. Les personnages sont un peu exaltés, avec un jeu légèrement outré. Il n’y a a aucune noirceur, à part celle caricaturale des méchants adversaires, aucune tragédie vraiment poignante en place.
D’ailleurs la simplicité du ton va avec celle de l’histoire, mais dont le rythme est mal équilibré, parfois même curieux. Le montage propose des ellipses abruptes et d’autres scènes qui s’étirent. Des idées sont parfois trop rapidement abandonnées, à l’image de l’amnésie du savetier bien facilement dissipée. Il semble aussi que l’histoire respecte assez mal les règles que le film énonce. La malédiction parlait d’un savetier moche, il ne l’est pas (charmant Jan Potměšil), l’anneau de la fée du soleil ne s’utilise plus de la même façon comme elle l’avait annoncé, etc. Tout ceci est parfois bien maladroit.
Le film se veut léger et veut créer une certaine fantaisie, et c’est peut-être là où il réussit le mieux. Les trucages sont assez nombreux, usant de jolis effets de transparence, d’incrustations et même d’animations en image par image, qui cherchent sans cesse à émerveiller le spectateur par la magie des effets spéciaux. Quelques beaux costumes sont aussi de la partie, comme celui de princesse, mais les accoutrements portés par les sorcières, de guenilles, sales et couvertes de poussières, de terre ou autres saletés sont parmi les plus réussis. Quelques décors de vieux châteaux fournissent assez bien le cadre médiéval (même si certains enduits semblent bien trop modernes), avec d’autres beaux paysages de la région tchèque et hongroise, tandis que d’autres constructions pour le film (le repaire des sorcières, le château de la fée du soleil) sont de belles réalisations.
La caméra est d’ailleurs assez mouvante, souvent en mouvement. Elle n’est guère solennelle, ne cherchant jamais à magnifier ses personnages, tous de toute façon sans grande gravité, mais s’amusant à se placer entre eux, pour mieux dévoiler les mimiques exagérées. Il y a tout de même quelques plans assez malicieux, assez imaginatifs.
Le film tel que vu dans cette édition française nécessiterait tout de même une petite restauration, les couleurs sont un peu passées, la résolution n’est pas optimale. Un petit coup de plumeau pourrait faire ressortir la beauté de ce film tchèque. Sa légèreté le dessert, et on pourrait lui reprocher un certain nombre de points dans sa progression. Mais l’ambition est différente, émerveiller le spectateur, dans un spectacle familial qui a pu faire son effet dans les salles de cinéma tchèques. De nos jours, le film apparait plus comme une amusante curiosité.
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le 7 août 2020
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