Étrange film que ce Whore...
Découvert en 1993 sur Canal+, je tombais par hasard sur ce film, déjà boulimique de péloches en tous genre...
Anyway, il m'en resta un arrière-goût...de quelque chose d'intéressant, mais je ne savais pas vraiment pourquoi...
Et ce soir, je viens de le revoir...
Suis-je à même de vous dire pourquoi il m'a encore plu?
Well, je l'espère.
A l'époque, j'avais trouvé l'interprétation de Theresa Russell...quelque peu surjouée, ou pas terrible...
Mais c'était en fait l'immonde VF, qui tirait son jeu vers le bas...
Revu en VO, le timbre plus grave de Dame Russell apporte un peu plus de gravité à ses monologues (nombreux) parsemant le film.
Monologue à notre destination, car là est l'une des étrangetés de Whore.
En effet, Liz/Theresa s'adresse à la caméra (comme un docu-fiction) mais le tout, s'insérant dans un métrage dit "traditionnel".
Étant donné qu'aucun des autres personnages ne semblent apercevoir une équipe de tournage, nous avons donc littéralement à faire à une complète fiction...
D'ailleurs, cet exercice s'appliquera aussi (le temps d'une scène) à son mac de Blake (Benjamin Mouton,remarquable en effroyable enfoiré)...
L'autre étrangeté étant le ton variable du film:
-on passe ainsi d'une satire sociale noire (les rencontres de Liz) aux horribles confessions vécues par ladite Liz,
-d'une certaine légèreté (via le perso hindou et sa mobylette) à la laideur quotidienne (Liz et sa vie maritale),
-du comique craspec (ledit mari qui vomit dans la salade) au drame (le viol et le tabassage en réunion de Liz par une bande de jeunes)...
Du coup, il faut s'accrocher pour rester à bord de ce navire, tanguant sur un océan narratif quelque peu capricieux ...
Cela fait, nous assistons à un film comme nul autre, nous entrainant dans le quotidien glauque et moche de cette pauvre Liz.
Ken Russell nous crache un certain réalisme (son scénario est adapté d'une pièce de théâtre, elle même inspirée par la conversation entre une prostituée et un chauffeur de taxi) et par la même occasion, est l'anti-thèse absolue de la romcom Pretty Woman (sur un sujet similaire) sorti quelque temps auparavant.
Et l'interprétation de Theresa Russell en ressort grandie, sa vulgarité et son inculture apportant une touche de réalisme à l'ensemble.
Bref, on en sort un peu groggy, mais la dernière image (Liz s'éloignant de la caméra dans un parking sombre, où pointe la lumière du jour à l'extrémité du cadre et ceci, juste après que Rasta -touchant Antonio Fargas- ait égorgé Blake, son souteneur) nous laisse imaginer que la trentenaire va éventuellement prétendre à vivre enfin sa vie.
Une parabole sur sa liberté retrouvée...