Boule rageante
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Après avoir brillé devant la caméra de Denis Villeneuve dans Prisoners et dans Enemy, Jake Gyllenhaal était passé entre les mains de Dan Gilroy pour le film qui a définitivement scellé son nouveau statut d’acteur de haut rang, Nightcrawler. Désormais dans le sillage de ces autres acteurs transformistes qui marquent de leur empreinte notre génération (Christian Bale, Michael Fassbender ou encore Matthew McConaughey, pour ne citer qu’eux), Jake Gyllenhaal revient à l’affiche dans Southpaw, sous la direction d’Antoine Fuqua.
Après avoir donc perdu 15 kilos pour Nightcrawler, Jake Gyllenhaal a cette fois-ci préféré jouer la carte de la prise de poids pour incarner le boxeur champion du monde des poids-lourds, Billy Hope. Ce nouveau rôle est à nouveau l’occasion pour l’acteur américain de nous montrer toute l’étendue de son talent, un talent qui commence doucement à avoir une odeur de nomination aux Oscars.
Billy Hope se promène sur un fil étendu au-dessus du vide : au sommet de sa carrière, on le sent pourtant fragile, prêt à craquer à tout moment. A l’image d’un Icare qui serait monté sur le ring, Hope n’a pas conscience des sacrifices que l’oblige à faire son ascension. Comme emmené par un brin de folie, le boxeur se laisse porter par ses coups, sans pour autant penser à ceux qu’il prend en retour. Le boxeur semble seul sur le ring, mais c’est pourtant dans le regard de sa femme qu’il se réfugie, même s’il n’en saisit ni l’intensité, ni la bienveillance. Hope semble en effet aveuglé par les coups qu’il prend, mais également par ceux qu’il donne. Si sa famille semble être sa raison de vivre, il a pourtant du mal à se détacher de la boxe, qui l’a sorti de sa misère, tout comme sa femme. L’état second du ring, l’ivresse que lui procurent les coups, ce sont ces choses-là qui mènent Hope au bord d’un précipice, qui se traduit par une fragilité fortement marquée aux lendemains de ses combats. Est-il prêt à faire un pas en arrière et à rejoindre sa femme à la maison, plutôt que d’avancer encore et de distribuer des uppercuts ravageurs, au prix d’arcades éclatées ?
Le meurtre de sa femme va littéralement couper les ailes du boxeur, qui devient alors l’ombre de lui-même, rattrapé par la réalité. Sa carrière s’effondre, et il en perd même la garde de sa fille, alors que l’ivresse du ring avait fini par rentrer dans sa vie privée. Hope perd tous ses repères, le sang qui coule de son arcade l’aveugle, il est désormais bel et bien seul, après tant d’années durant lesquelles il a pu s’appuyer sur sa femme et durant lesquelles ses coups suffisaient pour assurer son succès. S’enclenche dès lors une prise de conscience et une quête de rédemption qui va amener Hope non seulement à se dépasser, mais aussi à se retrouver lui-même, désormais seul sur le ring.
Billy Hope apparaissait dans un premier temps comme un boxeur à la limite d’un état second, qui ne mesurait pas les risques de sa façon de danser sur le ring. Grâce à une leçon d’humilité donnée par un Forest Whitaker juste le boxeur verra se substituer à la fougue de ses débuts un autre sentiment, qui est celui de la modération. Au-delà de la vengeance et de la colère, le boxeur agit désormais de façon réfléchie et saisit la nécessité de se protéger non seulement lui-même, mais également ceux qu’il aime. Billy retrouve alors son véritable nom, l’Espoir.
Southpaw s’impose dès lors comme une nouvelle référence du film de boxe, aux côtés des Rocky et autres Fighter, aidé par une caméra audacieuse, qui n’est pas sans rappeler la virtuosité dont Martin Scorsese avait fait preuve pour Raging Bull. Mais Southpaw propose une vision bien plus frappante de la boxe, avec une caméra incisive qui saisit la portée des coups ainsi que la solitude d’un boxeur qui, tant bien que mal, cherche un espoir auquel se rattacher. Le film se dote également d’une bande originale dantesque qui accentue également ce sentiment d’agressivité, sentiment nécessaire à la quête du boxeur, qui refuse de rester étendu sur le ring.
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Créée
le 23 juil. 2015
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