S'il est encore besoin de défendre le support physique et le travail des éditeurs pour préserver le patrimoine cinématographique mondial, voici un exemple concret. Car si Arrow Films n'avait pas décidé de restaurer The mad Fox pour le sortir en Blu-ray, il est fort à parier que je serais - une fois de plus - passé à côté. Il faut dire aussi que Tomu Uchida, cinéaste engagé pourtant passé maître après-guerre du film d’époque, n'est pas le plus connu des cinéastes japonais comparé à ses illustres confrères (tout du moins en occident), et encore moins pour ce film.
Il s'agit ici de la transposition d'une histoire médiévale et de personnages connus du "bunraku" (marionettes) puis du "kabuki" (théâtre traditionnel), qui commence par des intrigues de palais lors de l'assassinat de l'astrologue impérial. L'un de ses apprentis perd à cette occasion funeste sa bien-aimée, et il en devient fou de chagrin. S'en mêleront ensuite des "kitsune", les renards surnaturels bien connus du folklore japonais.
Le film peut être divisé en trois parties - ou plutôt trois actes-, avec d'abord la première assez classique en costumes, pour ensuite aborder le fantastique et enfin vraiment du théâtre filmé (l'actrice Michiko Saga devant quant à elle alterner trois rôles). Aux couleurs vives du début s'ajoutent des astuces de mise en scène qui peuvent paraître simples, mais qui s'avèrent du plus bel effet. Par exemple, au lieu de bouger la caméra c'est à l'image qu'il y a du mouvement ; et il y a aussi un peu d'animation. Puis ce seront finalement les décors qui changeront de façon visible comme sur une scène de théâtre, avec aussi une voix narrative qui est une autre caractéristique du kabuki.
A réserver donc sans aucun doute en priorité aux amateurs d'onirisme (les caractères chinois du prénom Tomu signifient tout de même "vomit les rêves" !), au moins certainement à ceux qui aiment déjà Kwaïdan de Masaki Kobayashi qui lui a succédé deux ans après, et dont il préfigurait l'onirisme fou.