Un duo de rêve

Lors de la création de sa pièce La rose tatouée, Tennessee Williams pressentait Anna Magnani dans le personnage de Serafina, mais la comédienne n’était pas disponible. Ce fut heureusement que partie remise lorsqu’est venue le temps de porter l’œuvre à l’écran. La charge avec laquelle l’actrice interprète les rôles qu’on lui confie se prête parfaitement à la complexité psychologique des protagonistes du dramaturge. Par la palette de son jeu, elle parvient à donner encore plus de nuances et d’accentuation aux couleurs des personnages qu’elle incarne. Ici on a droit à une veuve éplorée qui s’enlise dans le deuil trois ans après le décès de son mari alors que sa fille de 15 ans est prête à convoler en justes noces. L’amour est au cœur de la morale l’histoire. Alors qu’elle s’objecte au mariage de sa fille avec un de ces jeunes marins reconnus pour avoir des liaisons dans chaque port, Serafina s’enferme avec l’urne de son mari dont l’adultère est un secret de Polichinelle. Malgré les remontrances de son entourage sur son laisser aller, elle refuse d’ouvrir son cœur à qui que ce soit jusqu’au jour où un homme lui rappelant son époux l’incite à reconnaître ses cornes du cocufiage. Anna Magnani passe d’une émotion à l’autre avec intensité comme si elle était assise sur une auto-tamponneuse. C’est ce qui la rend si unique et, dans ce cas-ci, c’est ce qui lui a valu l’Oscar de la meilleure actrice. Mentionnons qu’elle a ici la chance de partager l’écran avec un partenaire pas reconnu pour jouer avec réserve et dont le talent est aussi immense en Burt Lancaster. Un duo de rêve !