Âpreté est le mot qui me reste à l’esprit après avoir visionné le premier long métrage de Pier Paolo Pasolini. Tout est rugueux, aride dans ce film : les décors, le propos, les dialogues. Il y a une violence qui traverse le film de bout en bout : Dans la condition des femmes, dans l’amitié masculine, dans le cœur du personnage d’Accatone. Comme si la dureté de la vie rendait insensible et ne laissait pas de place aux sentiments. En regardant ce film, j’y voyais la source de la culture mafieuse italienne et en même temps de tout le pan du cinéma qui s’y est consacré. Accatone incarne cette âme de barbare qui fait fi de la souffrance de l’autre en autant qu’elle rapporte. Jusqu’au jour où son cœur semble atteint par la pureté de Stella, une jeune femme vulnérable et sans malice. L’amour qui semble naître en lui est de courte durée. Son passé de proxénète le rattrape par le biais de la dénonciation à la police de Maddalena sa protégée qui n’accepte pas qu’une autre fille entre dans le portrait. Il est pris en filature et sa fuite le mène vers la mort. En général, Franco Citti joue la désinvolture avec un bon fond d’authenticité, mais son manque de remord nous refroidit. Là réside le génie de Pasolini. La vérité crue. Pas de flagornerie ou de demi-mesure. La caméra est là pour capter la vie telle qu’elle est et la poésie parvient à se faufiler à travers toute la cruauté qui s’en dégage. Un bon botté d’envoi pour celui qui saura se démarquer par sa manière d’aborder la dualité humaine partagée entre l’animalité et la conscience.