Peu de temps après le fantastique Les Raisins de la Colère, John Ford s'intéresse à nouveau aux dégâts commis par la Grande Dépression, ici en mettant en avant une famille de petits fermiers du sud où le patriarche doit vite trouver la somme de 100$.
Ce sujet mettant en avant l'Amérique des paumés est bien le seul point commun avec l'adaptation du livre de John Steinbeck. Ici, John Ford se montre surtout maladroit en mettant en scène une galerie de personnages hauts en couleurs et surtout très surprenants voire même totalement dégénérés. Ils sont souvent affreux, sales et méchants comme dirait Ettore Scola, mais ici surtout trop caricaturaux et rarement intéressants, dû en partie à une non-maitrise de John Ford qui ne m'a pas semblé savoir comment diriger son film.
Il oscille entre drame et farce mais ne trouve jamais vraiment le bon équilibre et aucun des deux n'est vraiment convaincant, surtout que Ford ne fait pas dans la finesse, au point d'en devenir un peu lourd à certains moments (le fils avec la bagnole surtout). La majorité des acteurs cabotinent tandis qu'il manque aussi une vraie ambiance cruelle et, surtout dans les deux premières parties du film, une vraie compassion et un regard juste sur la misère humaine, et ce qu'importe le ton utilisé (farce, drame etc).
Pourtant, La Route au Tabac trouve son salut (toute proportion gardée) dans la dernière partie, où John Ford fait ressortir tout l'humanisme des personnages et enjeux, où il met bien en avant des protagonistes blessés par cette crise, la rue et la vie tout simplement. C'est à ce moment-là qu'il va nous faire ressentir de vrais sentiments pour les personnages (enfin surtout le patriarche). Dommage donc, que ce soit si long et laborieux pour en arriver là.
Une oeuvre décevante avec un sujet pourtant prometteur mais John Ford ne trouvant que trop rarement le bon équilibre et tombant plutôt dans l'excès et la caricature, malgré une dernière partie où l'on retrouve son humanisme et savoir-faire...