La Secrétaire par Gérard Rocher La Fête de l'Art

Lee Holloway sort d'un séjour en hôpital psychiatrique. En effet cette jeune femme souffre, entre autres, d'un goût prononcé pour l'auto-mutilation . De retour chez elle, Lee retrouve ses parents ainsi que son petit ami Peter, jeune homme au mental déficient. Les soins prodigués par les médecins à la jeune femme n'ont pas produit un effet significatif sur son comportement et les symptômes persistent. C'est alors qu'afin de sortir de son climat familial étouffant et nocif pour son équilibre, la jeune femme, pleine de bonne volonté, décide de mener une vie normale. Pour cela elle se met à rechercher un travail lui offrant une place stable. C'est ainsi qu'elle finit par trouver un emploi de secrétaire chez un riche avocat, E.Edward Gray.
Le personnage est énigmatique, taciturne et dominateur. Celui-ci ne tarde pas à remarquer la manie tenace de Lee. Il va se permettre de lui en faire la remarque. Dès lors, comme dans un jeu de stratégie, une liaison sadomasochisme va s'instaurer entre eux deux. Lee, d'abord vexée, troublée puis envoûtée par cet homme, va tenter et finir par trouver un équilibre et un sens à sa vie au travers de l'étrange relation qu'elle mène avec son employeur.


Tout d'abord ce film de Steven Shainberg fort troublant est une belle et véritable histoire d'amour entre deux êtres torturés par de graves problèmes psychologiques qui ne cessent d'empoisonner leur vie. Et pourtant, malgré ces névroses qui les tenaillent et les blessent sans cesse au plus profond d'eux-mêmes, une osmose va leur permettre de trouver, à leur manière, un équilibre de vie à leur convenance..
Par ce biais va s'établir une complicité qui va les mener à leur épanouissement, synonyme du bonheur parfait. En fait Lee préfère cette existence de soumission qui lui amène passion, excitation, voire une certaine sécurité pour son propre équilibre psychologique. L'existence terne et conventionnelle qu'elle aurait pu mener avec son petit ami Peter n'aurait rien apporté de positif au niveau de sa névrose, bien au contraire, elle se serait sentie "différente" en se culpabilisant de son état. En fait, cette histoire démontre qu'il n'y a pas de règle pour vivre un équilibre à travers l'amour. Celui-ci, au-delà de tous les préjugés simplistes, peut se révéler et se concrétiser de différentes manières, même si elles ne sont pas des plus habituelles.


C'est un sujet bien délicat à traiter auquel s'est attaqué Steven Shainberg, compte tenu des rapports particuliers des deux principaux personnages. Le film débute en nous décrivant la situation actuelle du couple. Puis, très adroitement, le réalisateur revient six mois plus tôt afin de nous décrire le mécanisme complexe qui a sauvé la vie affective de deux êtres rongés par leurs névroses. Les scènes de cette oœuvre ne cachent rien de la manière dont ce couple vit ses sensations affectives. Tout est analysé avec une extrême minutie et nous entrons sans peine dans ce contexte de sado-masochisme tant la crédibilité des personnages est grande. Maggie Gyllenhaal est une vraie révélation dans un rôle complexe et ambigu. Elle donne une grande crédibilité à ce portrait de femme humiliée puis épanouie grâce à ce que certains appelleraient des "travers", qui ne sont en fait que des sensations très personnelles. L'excellent James Spader dans le rôle de ce notable à l'aspect austère, sévère, mystérieux et rongé par son mal-être se révèle lui aussi très naturel, à nous mettre mal à l'aise durant une grande partie du film. Ce couple atypique est fort bien entouré de Lesley Ann Warren et de Jeremy Davies.


Ce n'est que la seconde réalisation de Steven Shainberg et déjà on constate une maîtrise et une adresse assez remarquable dans le traitement d'un tel sujet. Les clichés habituels sont évités et la personnalité des personnages est adroitement mise à nu. Cela nous permet de nous faire comprendre une relation malheureusement taboue mais qui peut se montrer salvatrice pour certains, tous les goûts étant dans la nature... **heureusement !**


Ce film a obtenu:



  • Le Prix spécial du jury en 2002 au Festival de Sundanc

Grard-Rocher
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le 16 avr. 2013

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