On a donc une reconstitution, par des acteurs connus, de quelques discours des débats de la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1905. Le film ne cherche pas, comme je le pensais au début, à montrer les différents arguments de chaque parti, les artifices procéduriers, etc... A la place, inspiré des compte-rendus disponibles (plus de 1000 pages), on a une série de discours où chacun propose différentes visions de la république :
- l'abbé Gayraut considère que la religion catholique est constitutive de l'identité française.
- Maurice Allard défend une contre-proposition dans laquelle l'Etat garde le parc immobilier des églises. Il dit clairement chercher à terme à faire disparaître le cléricalisme.
- Aristide Briand tient la proposition initiale.
- Jaurès tente une synthèse réconciliatrice, en habitué de la dialectique.
- Le Comte de Baudry d'Asson souhaite que l'Etat et la religion se confondent, au nom du nationalisme.
Il fallait donc condenser sur ce vaste sujet.
Premier point, positif : le casting est bon. J'aime beaucoup Aristide Briand, et Arditi est un bon choix en ce qui le concerne, même si je ne sais pas s'il correspond à la fameuse "voix de violoncelle". Et Claude Rich en abbé est parfait. Quant à la beubar de Jaurès, mon Dieu !
Bon, au niveau de la réalisation, enfin surtout du montage, cela pêche un peu. Le film a été tourné dans l'Assemblée Nationale, ce qui est très émouvant. En revanche, au milieu des discours, on trouve de petits inserts un peu cache-misère. Et la musique est incroyablement générique, un peu comme dans ces mauvais jeux PC éducatifs des années 1990.
Le fait qu'avant chaque prise de parole, on ait une petite biographie des personnages ne me dérange pas. C'est un choix pédagogique qui se tient.
En revanche les dix dernières minutes sur la laïcité aujourd'hui sont assez contestables. Le texte en lui-même est juste, mais on trouve un montage alternant des images du ciel avec des nuages qui passent et le soleil en lense-flare, et des images de mortification religieuse (équitable, il faut dire : les bas-reliefs chrétiens du Moyen Âge avec l'Enfer, des musulmans ou autre se flagellant jusqu'au sang). Le mélange entre un discours assez lénifiant et des images choquantes a quelque chose de profondément maladroit.
Bon, le film était avant Charlie. On évite donc les polémiques, mais de mon point de vue, il serait bon de montrer que la laïcité n'a rien d'évident. Elle est souvent utilisée pour critiquer toujours la même religion, alors que beaucoup de nos jours fériés restent liés à des fêtes catholiques et que nos chefs d'Etat se déplacent au Vatican. Il serait temps de mettre en place un discours plus équilibré.
J'ai apprécié la reconstitution des débats, le reste est assez maladroit.