Pour le montage
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le 2 févr. 2023
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La Sixième Partie du monde, en référence à l'étendue de l'Union Soviétique par rapport aux autres territoires de la planète, peut se concevoir de plusieurs façons, selon le degré d'adhésion ou de rejet au matériau de propagande ainsi qu'au langage cinématographique développés durant toute sa carrière par Dziga Vertov. Mais le principal message du film est lié à l'exploitation de la diversité culturelle immense présente sur ces plus de 20 millions de kilomètres carrés, tout au long du XXe siècle. Des frontières chinoises jusqu'aux cimes enneigées du Caucase, des régions désertiques aux territoires prisonniers des glaciers, des forêts millénaires aux zones littorales, Vertov consacre l'essentiel du film à célébrer l'incroyable pluralité des cultures qui composaient ce sixième de Terre.
L'incise insérée par Vertov au tout début du film est toutefois d'une étonnante agressivité : le tableau esquissé en cinq minutes de la société capitaliste de l'époque est extrêmement virulent, en dénigrant le foxtrot et en pointant du doigt l'esclavage et l'asservissement des populations noires... Il faut reconnaître qu'au milieu des années 1920, l'URSS n'a pas encore inventé le goulag et l'idéologie soviétique s'annonce comme un chant utopique exhortant les peuples à l'émancipation, à la maîtrise des moyens de production. À mettre au crédit du réalisateur russe, l'éloquence frappante de La Sixième Partie du monde emporte tout sur son passage, que ce soit au travers d'intertitres gigantesques martelant ses messages d'agitprop avec vigueur ou par l'entremise de ce montage acéré qui mitraillera des fragments de paysages, de personnes, de cultures, et de travaux pendant un peu plus d'une heure.
Et l'effet produit se situe du côté du rouleau-compresseur, celui qui venait tracer la route de la victoire à coup de dynamite à la fin du film de Mikhaïl Kalatozov, Le Sel de Svanétie. Vertov interpelle avec ferveur le spectateur (un plan s'adresse directement à des personnes assises dans une salle de cinéma) comme il harangue les peuples de toute l'Union Soviétique, en multipliant les "TOI" (un carton qui emplit tout l'écran de ces trois lettres) qui composent ce 1/6 planétaire. Le ciné-poème est tourné à l'évidence à la gloire de l'expérience communiste, avec quelques figures de Lénine érigées dans le dernier segment, mais c'est vraiment la diversité du territoire soviétique qui constitue la base des célébrations. Au-delà des aspects purement propagandistes, la myriade d'images glanées aux quatre coins du continent conduit à une forme d'hypnose, une forme d'hallucination internationale — que l'accompagnement musical vient compléter, sur un versant plus désagréable me concernant, dans la lignée de ces musiques composées sous LSD bien trop envahissantes. Les modes de vie explosent sous une forme kaléidoscopique, avec un appel au rassemblement sous une même bannière, celle de la société socialiste complète. L'importance de la production agricole et des exportations, l'achat et la construction de machines variées, des mosquées et des tramways, un aigle kirghiz et un ours sibérien, un renard piégé et la chasse à la martre, le bain des moutons dans la mer (avec de nombreux intertitres surréalistes), l'élevage de rennes, des trappeurs apportant leurs fourrures en échange d'autres biens, un court passage en stop-motion consacré à l'empaquetage d'oranges, la fabrication du caviar, les blés battus et le coton filé, et la marche du progrès même si des gens croient encore en Mahomet, le Christ ou Bouddha et si d'autres mangent du renne cru. C'est fascinant.
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