Voici un film qui n'est pas un film pour une théorie qui se refuse à expliquer quoi ce soit. Beaucoup a été dit sur La Société Spectacle, et tout ce qui a été dit a été nié par Debord lui-même, qui un an aprés le film ajoute la moquerie à l'insolence en filmant une "Réfutation de tout les jugements, tant élogieux qu'hostiles qui ont été portés sur le film La Société du Spectacle".
Concrétement, le film se veut l'adaptation cinématographique de l'essai "La Société du Spectacle" par son propre auteur, entreprise malheureusement encore unique dans l'histoire du cinéma. Le livre était déjà un emsemble de 221 théses situationistes, mouvement intellectuel d'extrême gauche plus que radical dont Debord a été la figure tutélaire. Il y critique ce qu'il apelle la société du spectacle, soit l'emsemble de la société contemporaine et tout ses avatars, dont la principale caractéristique serait d'être toujours mis en spectacle, produisant sa propre representation en faisant disparaitre par la même toute possibilité d'un monde réel qui serait représenté.
Le film est donc principalement constitué d'images "détournés" de publicités, des informations filmés et de film soviétiques et hollywoodien (dont Guy Debord n'a jamais payé les droits). Sur ces images, une voix off propablement volontairement monocorde, cite des extraits du livre. Entre ces passages, des textes du livre ou d'autre auteurs révolutionnaires sont montrés à l'écran, en blanc sur noir. Des scénes de film nottament de John Ford sont aussi montrés, cette fois-ci avec la bande-son.
Les images ne sont que rarement l'illustration directe du texte, mais servent plutôt de fond dévoilant la dimension toujours spectaculaire de tout ce qui constitue le monde moderne. En même temps, ces images se révelent bien souvent comme illisibles, épousant par la même l'écriture circulaire, véhémente et souvent obscure de Debord. C'est que le film tout en critiquant le spectaculaire est conscient d'être, par sa nature même de film, un instrument du spectaculaire.
La seule possibilité qui est alors offerte au film est le dévoilement. Par la monstration inlassable des images produites par le spectacle, associé à leur critique, les images dévoilent ce qu'elles représentent, c'est à dire finalement rien. Car les images se sont émancipés du réel, la theorie elle-même ne saurait plus dire qui que ce soit du réel. D'où la nature fondalement aporétique du film, qui ne débouche sur rien d'autre que le dévoilement du néant.
Si on veut donc tenter de donner une critique du film, forcément inutile car toute critique a déjà été incluse dans celui-ci, il suffit de dire que en tant que tel, le film épouse parfaitement le texte qu'il adapte. Il a un effet sur le spectateur qui s'accroche suffisament, entre effroi, ironie et surprise. Une expérience hypnotique oú l'attention est toujours mise à l'épreuve de suivre texte et images, qui parasitent en même temps que sont l'exemple de la théorie. Comme si les images du spectatulaire empèchaient toujours de parler du monde, tout en étant la seule chose dont on ne puisse plus parler.
Les scénes des films montré avec la bande-son sont ici assez révélatrices, et les moments les plus forts du films d'un point de vue formel. La scéne se charge en même temps de la signification du texte qui l'a précédé tout en existant en tant que scéne déjà fortement chargée émotionellement (Debord prenant soin de choisir des scénes de grands réalisateurs, de Orson Wells à Raoul Walsh).
La Société du Spectacle est un appel à la révolution, non par une idéologie critique, mais par le dévoilement d'une société qui empêche toute possibilité d'un discours critique qui ne serait approprié par elle.