Le retour de la fiancée aux cheveux blancs
The White Haired Witch of Lunar Kingdom est une nouvelle adaptation d’un célèbre roman chinois de Liang Yusheng. Le livre a déjà été adapté de nombreuses fois aussi bien à la télévision qu’au cinéma. On aperçoit même le personnage principal, Jade Raksha, dans le film américain Le Royaume Interdit. Mais la plus célèbre version est celle de Ronny Yu, trouvable en France sous le nom de Jiang Hu, un formidable chef d’œuvre de noirceur et de lyrisme sorti en 1993. Difficile de ne pas l’avoir en tête en découvrant cette nouvelle adaptation, et l’on pouvait se poser la question, le réalisateur Jacob Cheung fera-t-il aussi bien que son prédécesseur ?
Disons-le tout net, la réponse est non. Ce nouveau film reste bien en dessous du précédant et ne parvient à aucun moment de le faire oublier. D’une certaine manière, il lui est même peu comparable puisque l’intrigue est presque totalement différente, seule reste l’histoire d’amour entre Jade Raksha et Zhuo Zhonglian. Mais le contexte est totalement distinct, le film se veut beaucoup plus spectaculaire et se place dans la veine de ces nouveaux blockbusters chinois mélangeant fresque épique, wu xia pian et effets spéciaux numériques. Pour ce faire le film bénéfice de toute évidence d’un budget confortable, et le résultat se paye à l’écran.
Esthétiquement le film est très réussi, les paysages, les décors et les costumes sont magnifiques, le spectateur en prend plein les yeux. Même les effets spéciaux ne sont pas mauvais pour un film chinois (alors qu’ils ont habituellement vingt ans de retard…). Le cast n’est aussi pas en reste puisque les deux personnages principaux sont joués par les acteurs à la mode du moment que sont Fan Bingbing (Jade Raksha) et Huang Xiaoming (Zhuo Zhonglian), ce qui était déjà le cas dans Jiang Hu avec Leslie Cheung et Brigitte Lin. Malheureusement, l’interprétation n’est pas vraiment à la hauteur de ces deux derniers – encore que Fan Bingbing s’est sort relativement bien – mais son partenaire ne s’est pas trop fatigué, il reste mono-expressif du début à la fin. Ce qui a pour conséquence de rendre la romance tragique, entre eux deux, peu crédible…
Hélas ce n’est pas le seul défaut du film. Le film se veut aussi ambitieux au niveau de son histoire en mêlant, en plus de l’histoire d’amour, complots royaux, écoles d’art martiaux, invasions étrangères et méchants généraux. Le problème c’est que… on n’y comprend rien ! Le scénario souffre en effet d’un sérieux manque de lisibilité qui fait que vers le milieu du film tout devient très confus et il prend une direction très différente du début… pour finalement y revenir. Il y a bien quelques explications inscrites de temps en temps à l’écran mais c’est insuffisant. On compte aussi des flash-backs censés être explicatifs mais qui ajoutent encore plus de confusion. Problème d’écriture du scénario ou de montage ? Difficile à dire… On finit quand même par comprendre que voilà, il y a des méchants et puis il y a des gentils, même si on ne sait pas trop pourquoi, ni à quoi servent certains personnages (comme celui qui se fait passer pour le père d’une fillette).
On peut aussi regretter que le film soit au final assez avare en combats pour un wu xia pian. Il y en a un peu au début, puis à la fin et c’est tout. Ils sont en plus peu spectaculaires, comparés par exemple aux derniers films de Tsui Hark (pourtant consultant sur le film !). On retient surtout une scène sympa de bravoure héroïque lorsque le personnage de Corail résiste à elle toute seule face à une armée d’envahisseurs. Il est aussi dommage que le métrage se centre sur le personnage de Zhuo Zhonglian, alors que le titre du film met en avant l’héroïne féminine, dont le personnage est surement le plus intéressant.
Malgré une narration maladroite, The White Haired Witch of Lunar Kingdom reste plaisant à regarder et permet de passer un bon moment, principalement grâce à une histoire d’amour aux accents shakespeariens et un esthétisme très travaillé.
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