Déconsidéré par son propre réalisateur, le traitant de "film mort", La source est le premier long métrage dit de "rape and revenge" ayant, par exemple, inspiré la dernière maison sur la gauche de Wes Craven. Mais sans se contenter de mettre par image cette simple histoire de vengeance où l'on voit deux hommes et un enfant venir crécher sans le savoir chez le père de la fille qu'ils ont violée, Bergman inscrit son univers autour d'un thème qui le questionne depuis toujours, celui de la religion. Mais là où le bas blesse, c'est que ce clivage entre christianisme et paganisme sera utilisé de façon un peu trop manichéenne et symbolique, notamment au début de son film. Ce n'est pas un hasard si La source commence tel un conte de fée avec la jeune Karine habillée comme une belle et blonde princesse, aimée de ses parents croyants, qui vont lui demander d'aller amener des cierges à l'Eglise avec sa sœur adoptive Ingeri. Mais ce charme douceâtre de cette grande ferme, de ces belles prairies font faire place de minute en minute, à une odyssée doucement claustrophobe.
Le rythme est lent, la mise en scène sobre mais non dénuée de beauté, le ciel est bleu, les oiseaux chantent, l'insouciance de la jeune Karine est naïve mais le mal, la primitivité de l'Homme n'est jamais loin. Ingeri, brune et servante, voue un culte à Odin et elle assistera sans broncher au viol de sa soeur. Bergman avec un talent de metteur en scène hors pair, fera alors basculer cette douceur dans l'hystérie contagieuse. La culpabilité envahira le petit enfant muet, la peur et le chagrin imprégnera la mère de Karine. Le père, aura beau être un chrétien de ce qu'il y a de plus croyant, sera l'auteur lui aussi des pires atrocités. Peu importe la fois, peu importe les dogmes qui dirigent nos vies, la nature humaine est plus forte que tout. La violence, la folie, une part de morbidité font parmi de l'Homme. Fait de doute religieux, d'une vision sordide de la nature humaine, La Source est un beau film quoique un peu lourdement symbolique et inutilement lent.