La Strada, incontournable film italien, est enfin inscrit à mon tableau de visionnage. Sans regret.
Fellini, scénariste du néo-réalisme (de Rossellini, notamment), fait ici du néo-réalisme augmenté. C'est-à-dire que le néo-réalisme, c'est montrer la misère telle qu'elle est, ne rien occulter de ce que cela veut dire, des rapports de domination également dans ce milieu (les hommes / les femmes, les forts / les faibles, les gentils / les méchants), en montrer tout le tragique sans toutefois montrer quelque chose d'absolument désespéré. Fellini y ajoute quelque chose : une poésie absolue.
Le quidam que je suis pense que dans ce film, l'acteur majeur, c'est Anthony Quinn. Dire qu'il joue mal l'acteur tout en corps, en physique, en bestialité serait mentir. Il est complètement dans son rôle de casseur de chaîne, bête de foire claquant tout son fric en vin (bon, c'est du toscan, alors ça passe). Mais Masini, c'est la vraie star. Elle fait tout le sel de ce film, toute la poésie : simplette s'émerveillant du vaste monde qu'elle ne connait pas, personnage de cirque de rue à mi-chemin entre le clown blanc et Charlot, le tout graçe, surtout, à un visage particulièrement expressif. Et en écrivant ces lignes, je m'en rends compte que Fellini sort du simple néo-réalisme grâce à ce personnage qui nous amène ailleurs, dans un monde onirique, bon, simple, dépourvu d'avidité et de malice.
Ce film, évidemment, bénéficie de surcroît de la musique de Nino Rota. Et c'est décisif. Cette petite musique de quelques notes, mélancolique et joyeuse, passée dans notre patrimoine musical tellement le film est indissociable de la musique. Et même, on peut penser qu'il y a plus de gens qui connaissent la musique que de gens qui ont vu le film.
Un vrai grand beau film. Qui passera peut-être à 9 plus tard.