C'est avec La Strada que Federico Fellini connaîtra son premier succès international, oeuvre dans laquelle il met en scène le parcours d'une jeune fille vendue par sa famille très pauvre à un lutteur de foire.
À partir de ce point de départ, le cinéaste italien dresse le portrait de ces deux personnages où il opposera la brutalité et force de Zampano à l'innocence et fragilité de la jeune Gelsomnia. Deux visions qu'il n'hésite pas à pousser vers la caricature pour mieux en faire ressortir la force et l'émotion, ce qu'il fait merveilleusement, sans pour autant tomber dans la facilité ou le misérabilisme mais toujours avec justesse et intelligence.
C'est surtout autour de Gelsomnia qu'il va braquer sa caméra où, comme pour elle, il va nous faire passer par tout un panel d'émotion, de la tristesse à l'intensité du cirque et de la vie sur la route en passant par la joie éphémère. D'ailleurs, l'émotion passe autant par les gestes et regards que les mots et Gelsomnia est tout le long inoubliable, que ce soit avec ses expressions enfantines ou ses traits rappelant Chaplin. Fellini donne à son oeuvre une dimension humaniste, poétique, intemporelle, puissante et mélancolique et jette un regard tendre sur elle. Le cinéaste italien bénéficie aussi de la magnifique partition de Nino Rota, sublimant chaque image du récit.
L'histoire est assez simple mais touchante, Fellini trouvant toujours le bon équilibre entre les tons et sachant nous immerger sur les routes aux côtés des protagonistes. L'intrusion de certains personnages autour d'eux deux est toujours bien géré, sachant toujours faire rebondir l'histoire pour accentuer l'émotion et son étude riche, et fine, de l'âme humaine. De nombreuses scènes sont d'une force incroyable, que ce soient les regards de Gelsomnia ou les sanglots solitaires et bouleversants de Zamparo sur la plage. L'oeuvre tient aussi sur les épaules d'acteurs merveilleusement dirigés, que ce soit un imposant et charismatique Anthony Quinn, la frêle et touchante Giulietta Masina ou Richard "Le fou" Basehart.
C'est une oeuvre d'une infinie tristesse, mélancolie et humanisme que Federico Fellini met en scène avec La Strada, un film inoubliable porté par d'excellents interprètes et dont chaque image se révèle riche et émouvante.