Soapdish est à l’image de son casting, foisonnant et agité. Cette comédie sur les dessous des soap opéras n’hésite pas à se moquer de ses plus évidents travers. Ces séries feuilletonesques aux péripéties épatantes d’aplomb, ces comédiens au jeu forcé et rarement juste, aux mises en scène simplistes et trop éclairées, bref, ces créations télévisuelles faites pour entraîner le spectateur d’un épisode à l’autre, mais sans faire peur à la ménagère.


De tout cela le film de Michael Hoffman n’hésite pas à s’en moquer, ses reproductions de la série The Sun Also Sets ont le charme faux de ces productions, l’illusion est évidente, la caricature légèrement grossie soulignant ses principaux vices et clichés.


Mais l’ambition de Soapdish est d’exposer sa galerie de personnages, tout ce petit monde s’affairant autour de la série, avec les décideurs, l’équipe technique et les acteurs, bien entendu. Le film s’ouvre d’ailleurs sur une cérémonie de remise de prix, à l’attente certaine, au résultat en décalage. Malgré toute la pression, ce ne sera qu’une statuette de plus pour Celeste Talbert, héroïne du show mais fébrile et agitée, malmenée par une rupture amoureuse et les manigances du producteur, David, et de Montana, une actrice rivale pour lui faire prendre sa retraire. Jeffrey Anderson, un ancien acteur du show viré va être intégré, en dépit de toute cohérence scénaristique (pas grave), tandis que Lori, la nièce de Celeste va prendre une place de plus en plus grande sur le plateau.


Il faut voir ce petit monde s’agiter, se faire des amabilités pour mieux lancer le couteau dans le dos. Ce petit monde aux égos fragiles, aux jalousies évidentes ou aux ressentiments mieux dissimulés prend place dans le plateau de la série télévisée, avec ses décors mais aussi ses couloirs, ses bureaux ou ses salles de réunions. La scénariste principale ne peut parfois rien faire contre les décisions arbitraires mais aussi les plus évidentes des magouilles pour influer sur le sort de tel personnage. Le trait est évidemment forcé, mais son exotisme amuse, et la représentation de ce monde est bien réalisée.


Quelques années avant Radioland Murders, comédie burlesque dans le monde de la radio de la fin des années 1930, Soapopera est peut-être plus grinçant, mais possède le même humour, un peu farfelu. Quand les histoires personnelles des personnages principaux deviennent plus folles que celles de leurs acteurs dans le show, le film perd un peu de sa saveur, là où son immersion sans but clair dans ce monde fou était plus réjouissant.


Soapdish réunit une bel équipage, une belle brochette d’acteurs confirmés de ces années, à qui il est demandé d’en faire un peu trop, dans l’exagération voulue du ton de cette comédie, et qui répondent à cette demande avec un certain entrain. Sally Field est au centre, et on pourrait s’amuser de faire le parallèle entre son personnage, une actrice au sommet de sa carrière, appréhendant la chute, avec son parcours personnel, les Oscars dans les années 1980 et une décennie suivante plus traditionnelle dans le cinéma grand public. Sally Field passe par toutes les émotions dans ce film, sans aucune demi-mesure, dans l’outrance de son personnage inquiète et affolée. Hormis la scène de la révélation “familiale”, où sa peine est moins crédible, il faut tout de même être une talentueuse actrice pour passer tout le film dans des états aussi différents, avec un ridicule pleinement assumé par le film.


A ses côtés, Whoopi Goldberg dans le rôle de la scénariste et amie adopte un jeu plus calme, moins exubérant que d’autres de ses films, ce qui lui va bien. La candeur d’Elisabeth Shue qui joue la nièce de Celeste sera rapidement mise à mal. Notamment par Kevin Kline, dont sa prestation rappelle celle de son personnage dans Un poisson nommé Wanda. Quel plaisir d’y retrouver aussi Robert Downey Jr, stoïque et manipulateur, mais berné par les promesses sexuelles de Cathy Moriarty. Et on y croise même Kathy Najimy, Teri Hatcher et Carrie Fischer, une belle galerie.


Tout le monde n’appréciera pas cette peinture un peu agitée de ce monde de la série télévisuelle des années 1990, d’autant que l’humour est avant tout caricatural plutôt que critique. Les personnages s’activent, les comédiens manigancent ou hurlent, et une scène en chasse l’autre. Il y a dans Soapdish un entrain qui peut user. Mais c’est aussi sa folie douce qui peut convaincre, cette plongée dans un univers rarement vu depuis les coulisses, bien rempli par une belle distribution.

SimplySmackkk
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le 20 juil. 2021

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SimplySmackkk

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