On peut déjà rendre honneur et remercier ce film pour une raison : celle de mettre en lumière une actrice méconnue et sous-employée, souvent cantonnée à des seconds rôles, et qui a ici l’occasion de briller en tête d’affiche et de montrer l’étendue de son talent. Il s’agit de Florence Loiret-Caille, vue notamment dans les films de Jérôme Bonnell ou dans la série « Le Bureau des légendes ». Elle porte le film sur ses frêles épaules dans le rôle de cette femme au mode de vie précaire obligée, pour combler les fins de mois difficiles et payer l’emplacement de camping de son mobil-home, de vendre des cigarettes de contrebande et qui va se laisser tenter par un trafic bien plus risqué : celui d’êtres humains, en étant passeuse de migrants. Investie, impeccable et dans le vrai dans chacun des plans, c’est l’atout majeur de « La tête froide ».
Pour un premier film, on ne peut que louer la manière concise et efficace avec laquelle Stéphane Marchetti a écrit son script et l’a mis en scène. Il parvient à mélanger le drame et le suspense sous couvert d’un portrait de femme combattive. Et tout cela avec le contexte social et humanitaire délicat des migrants qui traversent la frontière franco-italienne. L’ensemble est d’une fluidité remarquable et tenu sur un récit condensé et impactant d’à peine une heure et demie. D’ailleurs, il faut dire que le sujet des migrants inspire beaucoup le cinéma en ce moment. Du surestimé « Mon Capitaine » de Matteo Garrone au sublime et romantique « Ils sont vivants », premier film de Jérémie Elkaïm, en passant par un film jumeau sorti un an plus tôt avec Denis Ménochet qui prenait place dans la même zone géographique (« Les Survivants ») mais qui s’orientait davantage sur les rives du film de survie et du suspense, ce thème très contemporain inspire le cinéma dans une veine très (trop?) humaniste.
« La tête froide » réussit donc son coup et se révèle un petit film bien fait qui ne passe pas par quatre chemins et montre aussi bien les conditions de voyage extrêmement horribles et difficiles de ces hommes et femmes qui jouent leurs vies que la précarité subie par certaines personnes en France, obligées de verser dans l’illégal pour survivre. Cependant, il manque un peu d’ampleur au film pour être une œuvre coup de poing ou un long-métrage vraiment mémorable. Il y a bien des moments de tension bien sentis et d’autres plutôt émouvants, mais la facture de l’ensemble lorgne parfois sur le téléfilm. Le dernier acte en montagne apparaît également un peu forcé et engage le film vers un happy-end pas vraiment à sa place. Des débuts à surveiller pour un film sympathique aux sujets forts et qui vaut surtout pour son actrice principale qui, on l’espère, aura accès à plus de rôles de cette trempe.
Plus de critiques cinéma sur ma page Facebook Ciné Ma Passion.