Il faut immédiatement évacuer un malentendu il me semble: le film de Nikolaj Arcel est vaguement adapté du cycle de la tour sombre de Stephen King. Il est si vaguement adapté qu'on peinerait à faire un jeu des septs concordances entre le film, et la quête épique en 3500 pages de Stephen King.
Il y a bien une tour, et elle est noire.
Il y a l'homme en noir qui est habillé en noir, ce qui colle assez bien avec la description du personnage si on n'y regarde pas de plus près et qu'on ne s’embarrasse pas plus que ça de la psychologie des personnages. .
Il y a Roland Deschain qui est un pistolero, et qui est noir, alors que dans le roman, il est blanc, mais vu que je fais partie des gens qui n'accordent aucune espèce d’importance à ce détail(et si jamais vous en aviez accordé, il n'est pas trop tard pour vous rendre compte à quel point vous êtes cons; je vous en prie, c'est gratuit), on va dire qu'on s'en tamponne bien comme il faut.
Il y a Jake Chambers qui n'est pas noir, mais qui voit dans ses rêves tout les trucs noirs susmentionnés, et qui va voyager à travers les mondes pour retrouver Roland.
Il y a Roland qui poursuit l'homme en noir (le film semble insister sur le fait qu'il le poursuit à travers le désert à plusieurs reprise, histoire de coller à l'incipit de la saga de King, sauf que pas vraiment, puisque l'homme en noir ne fout jamais les pieds dans le désert).
Et puis c'est à peu près tout.


Les fans de la saga de King y verront quelques clins d’œil avec des petits morceaux (tellement rapides que vous risquez de les rater si vous clignez trop longtemps des yeux) des différents bouquins de King, réduits à leur plus simple expression: vous prenez le fait que Roland soit malade et ne sache plus utiliser sa main droite dans les trois cartes, et qu'il va à New-York pour se faire soigner à coup d'antibiotique; vous prenez la quête de Chambers pour retrouver Roland dans Terres perdues; et vous prenez quelques éléments du sixième opus Le Chant de Susannah; vous mélangez le tout au blender, vous y ajoutez une pincée de combat du bien contre le mal bien classique,et une intrigue plutôt simple à base de gamins qui ont le shining et que Walter utilise pour faire tomber la tour; et vous avez le film.


On va dire que pour les gens qui auront lu le cycle de King, c'est assez décevant, mais d'un autre coté, si vous aimez ce que fait King, c'est pas la première fois de votre vie que ça vous arrive non plus! Faut être juste.


Donc, si on retire de l'équation le fait qu'il y ait a peu près autant de rapport entre ce film et le cycle qu'entre une boite de pois chiche et un couscous royal, qu'en est-il du film en lui-même?


Et bien, ça passe. Sans vraiment être mémorable en quoi que ce soit, mais ça passe.
J'en suis le premier surpris vu la manière dont le film s'est fait descendre quasi unanimement par la critique. Je m'attendais à un fiasco total, et puis non en fait. C'est pas une réussite non plus, mais le film est très loin de mériter l’accueil glacial qu'on lui a réservé.


L'intrigue est simple (pour ne pas dire simpliste) ,et totalement linéaire (ce qui fait que je me pose de sérieuses questions sur les capacités cognitives de nos amis critiques qui semblent insister sur le fait que l'histoire est un joyeux bordel) et se suit donc sans avoir particulièrement besoin de réfléchir tous azimuts, ce qui permet de se concentrer sur quelques scènes d'actions pas mal troussées sans pour autant être particulièrement enthousiasmantes.


Idris Elba fait le taf en Roland, même si le film par son rythme et sa durée ne laisse pas le temps à l'acteur anglais pour donner vraiment beaucoup de substance à Roland Deschain, et que son coté effrayant ne transparait pas vraiment; encore qu'il y ait un effort certain pour montrer le coté monomaniaque du héros de King.

Tom Taylor n'est pas mauvais non plus en Jake Chambers.
Matthew McConaughey quand à lui semble un peu perdu dans ce rôle de méchant sorcier, et ne brille, ni n'impressionne vraiment dans aucune scène, semblant se contenter du minimum syndical pour un acteur de cette trempe. Sa prestation reste un des gros points décevant du film, tant il n'arrive jamais à rendre son personnage assez effrayant, ou différent de n'importe quel méchant sorcier standard.


Le film dure autour de 90 minutes, ce qui je pense est plutôt en l’occurrence une qualité qu'un défaut (défaut devenu commun dans le cinéma moderne de vouloir raconter des histoires sur deux heures trente quand on a de la matière pour une heure et quart) , et permet à l'histoire de se développer en allant directement à l'essentiel dans le cadre de cette adaptation. En bref Arcej, et ses scénaristes, esquivent les difficultés de cette adaptation, en survolant l'intrigue sans tomber dans des scènes d'expositions à n'en plus finir qui n'aurait fait qu'alourdir le propos. Cette technique digne du coup du sombrero pour passer une défense coriace permet même au film de garder un coté un peu mystérieux et inexpliqué, et bizarrement assez fidèle à l'esprit du cycle à défaut d'y être fidèle à la lettre.
Le film est donc un véritable travail d'adaptation avec même une certaine audace, et au risque de choquer certains d'entre vous, n'est pas pire à regarder que les adaptations du MCU se répétant à longueur d'années. Le problème, c'est qu'il n'est pas mieux non plus.


Reste que cette adaptation sans être atroce est très loin (mais très très loin je veux dire) d'être satisfaisante pour le fan du cycle que je suis.


Donc, si vous êtes un fan de la saga de fantasy horrifique de King, vous ne pourrez qu'être déçu. Pour eux, on va mettre la note de 4/10
Si vous êtes un spectateur lambda, vous pourrez toujours aller manger un paquet de popcorn en regardant un film qui n'est pas pire que tous les autres films de super héros que vous regardez d'habitude, et qui vous fera passer le temps, même si vous n'en garderez pas un souvenir impérissable, c'est une certitude. Un 6/10 en somme.


En ce qui me concerne, j'aimerais qu'un jour il y ait une adaptation de la tour sombre en série, seul moyen à mon sens de développer correctement l'histoire de Roland Deschain de Gilead et de son Ka-tet. Après tout, comme n’arrête pas de le dire Jake Chambers dans le cycle: " il y a d'autres mondes que celui-ci", et je ne vois pas pourquoi cela ne pourrait pas être le cas également pour cette adaptation.

Samu-L
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Films vus ou revus en 2017

Créée

le 22 août 2017

Critique lue 3.3K fois

42 j'aime

4 commentaires

Samu-L

Écrit par

Critique lue 3.3K fois

42
4

D'autres avis sur La Tour sombre

La Tour sombre
Frédéric_Perrinot
4

Un duel sans envergure

La saga The Dark Tower est probablement l’œuvre majeure de son auteur, Stephen King, mais est aussi paradoxalement une de ses moins connue du public. Comme beaucoup d’écrivains, ses œuvres ont avant...

le 13 août 2017

50 j'aime

La Tour sombre
Samu-L
5

Le coup du sombre héros

Il faut immédiatement évacuer un malentendu il me semble: le film de Nikolaj Arcel est vaguement adapté du cycle de la tour sombre de Stephen King. Il est si vaguement adapté qu'on peinerait à faire...

le 22 août 2017

42 j'aime

4

La Tour sombre
Bullchill
1

Déception, trahison

Je précise que c'est une saga que j'ai dévoré, qui m'a fait passer par toutes les émotions possibles, et que je compte relire plusieurs fois avant de lâcher mon dernier souffle. Cette adaptation est...

le 9 août 2017

35 j'aime

4

Du même critique

Star Wars - Le Réveil de la Force
Samu-L
6

Star Wars Episode VII: A New Hope Strikes Back

Divulgâchage épique dans ce billet!!! Au départ, j'avais décidé de pas intervenir. Je m'étais dis: " mon petit Sam, est-ce que ça vaut vraiment la peine de t'embarquer là dedans? Parce que tu sais...

le 18 déc. 2015

286 j'aime

97

Joker
Samu-L
8

Renouvelle Hollywood?

Le succès incroyable de Joker au box office ne va pas sans une certaine ironie pour un film qui s'inspire tant du Nouvel Hollywood. Le Nouvel Hollywood, c'est cette période du cinéma américain ou...

le 8 oct. 2019

236 j'aime

14

Monty Python - La Vie de Brian
Samu-L
10

I say you are Lord, and I should know. I've followed a few

On est en 1993, j'ai 15 ans (enfin plus ou moins), et je m'ennuie un peu en cette soirée d'hiver, je déprime pas mal aussi. J'allume la télévision et je zappe d'une série B à une série française...

le 4 mars 2012

208 j'aime

20