Fatah a semble-t-il, deux êtres chers dans sa vie : sa femme Naïma et Jacqueline, sa vache face à laquelle sa dulcinée n'a pas l'air de faire le poids et heureusement pour elle en fait. En effet pour son animal de compagnie Fatah est prêt à traverser la Méditerranée et la France de Marseille à Paris (et à pieds s'il le faut) pour atteindre le salon de l'agriculture, un rendez-vous dont il rêve depuis de nombreuses années.
Fatah dès les premières minutes du film nourrit chez le spectateur un capital sympathie presque et sans doute pour beaucoup assuré pour l'heure et demie à venir : il connaît par coeur les tubes français des années 80, il est l'objet de railleries au sein de son village et surtout l'amour qu'il porte à Jacqueline est si bien retranscris à l'écran qu'on est forcé de tomber dans le panneau.
Les aventures qu'ils traverseront jusqu'à Paris iront encore dans ce sens : on s'attachera au duo et même si les différentes péripéties ne sont pas toujours traitées d'une façon qu'on aurait espéré pour que le charme opère encore plus et surtout qu'au final elles s'avèrent plutôt rares par rapport à ce qu'on peut attendre d'une pareille histoire, on pardonnera ce défaut de développement car comme l'affiche du film l'indique (ou nous le suggère de façon publicitaire), le coup de coeur pour les protagonistes qui font écho au film d'Henri Verneuil avec Fernandel en 1959 (dont on voit d'ailleurs un extrait) est quasi immédiat.
Et puis bizarrement, la magie a cessé d'opérer en ce qui me concerne quand la sauce médiatique est venue se rajouter à l'aventure : les réseaux sociaux, le buzz dont s'emparent les JT et les émissions populaires des années 2010. Ayant vu la veille un autre film avec le même genre de procédés (Amis publics sorti le même jour), j'avoue que ce phénomène de société qui donne raison à Andy Warhol quand il annonçait que tout monde pourrait prétendre à son quart d'heure de gloire à l'avenir, a fini par m'agacer un peu. Alors j'ai pensé à cette vache qui a fini par gagner le prix du public au salon de l'agriculture alors qu'elle a rien demandé...J'avais l'impression d'être moi-même un bovin devant l'écran, tout ce chemin pour en arriver là, comme si moi aussi on m'avait mené par le bout d'une laisse pour que je me rende à cette foire au bétail...sauf que là c'était une salle obscure. C'était tellement convenu et consensuel que je me suis senti con : oui j'appartiens à une espèce qui peut s'émouvoir de la relation qu'entretient l'un de ses semblables avec un animal qui n'a sûrement pas été aussi bien payé que Jamel Debbouze (de vache), alors qu'il a un moins bon rôle que la mannequin des laitières. Avec un peu de chance et parce qu'elle est désormais une star, Jacqueline ne finira pas dans un abattoir pour se transformer en steaks de premiers choix, et c'est déjà ça de gagné. Bref, on vit une époque formidable !