A quoi ça tient un bon film ?
C’est la question que me trotte dans la tête comme je rentre de l’avant-première du dernier film à envahir notre fil d’actualité.
Deux heures plus tôt, mon accompagnant engoncé dans son siège du Gaumont Opéra se plaignait que le réalisateur nous spoilait tout le film avant sa projection, en racontant qu’il était tiré d’une anecdote réelle.
Personnellement, ce qui m’intrigua le plus dans l’affaire ce fut le ton désopilant avec lequel le-dit réal nous expliqua qu’un de ses étudiants qui se prostituait lui avait raconté que dans la chambre à côté de laquelle il tapinait un vieux avait voulu qu’il soit son témoin pour son suicide assisté, parce que son propre témoin lui avait posé un lapin.
On tient là un bon package de départ : sujet complexo-burlesque (l’euthanasie et la prostitution traitées sur le ton de l’humour), quiproquos en huit-clos et dialogues plutôt aiguisés.
L’action se joue dans un décor étrange, un motel de Lausanne quasi désaffecté. Néanmoins l’essentiel du film est tourné en studio, rajoutant au côté « théâtre-vérité » de ce qu’un synopsis de Studio Ciné Live pourrait appeler une « comédie dramatique intimiste sur fond de problèmes sociétaux ».
En outre, si un film tenait à son casting, celui-ci ne déparerait pas. L’excellente Carmen Maura en accompagnatrice de suicide envoie réplique sur réplique ; se cache derrière des poubelles et cela nous faire rire ; pose sa main sur l’épaule du héros nous mettant larme à l’œil. Les deux autres personnages principaux, le vieux cancéreux suicidaire comme le prostitué russe, sont quant à eux interprétés par des acteurs encore moins connus que les figurants de Plus Belle la Vie, mais bien plus talentueux.
Malgré tout… malgré tout à quoi ça tient, un bon film ?
Celui-ci, bien armé, pavé de bonnes intentions, débordant de bonnes idées (dont une scène surréaliste autour d’une piscine « non aux normes »…c’est trop long à expliquer), ne parvient pourtant pas à me captiver outre-mesure. Une partie de l’auditoire sera probablement très enthousiaste devant ce bon petit film d’auteur franco-suisse, l’autre, comme moi, restera dubitative.
Trop de facilités avec le scénario parfois (des scènes puissantes éludées par des fantasmagories métaphoriques, comme celle de la confrontation père-fils), des lenteurs soulignées par des défauts de rythme ici-et-là, un final convenu avec une citation hors sujet… tout cela fait tiquer même mon ami lecteur assidu de Télérama, c’est dire.
Au final, comme le projet de loi sur l’euthanasie en France, ma question est sûrement destinée à rester sans réponse.