Tavernier, l’eau de vie et rien d’autre !

« Un monument » c’est ce qui est annoncé sur l’affiche du film. Un film dont je n’avais jamais entendu parler. Il faut dire que je ne connais pas du tout l’œuvre de Bertrand Tavernier, je le découvrais en même temps que je découvrais le film.
Bref « un monument », les rares notes attribuées au film sont des notes élevées. Je n’attendais donc qu’à être surpris. Je dois vous l’avouer, et jai pas envie de faire le pisse-froid vu l’engouement que la sélection du film avait provoqué, mais je suis hyper déçu.

Pourtant, tout démarrait bien, Tavernier avait un matériau de base super intéressant : parler de l’après-guerre, des personnes disparues, de ces femmes meurtries remuant ciel et terre pour retrouver leur moitié. On avait de quoi faire un grand film et marqué les esprits. En plus de cela, on a le grand Philippe Noiret dans le rôle principal. Sur le papier, ça avait de la gueule.
Mais malheureusement comme on dit au rugby, l’essai n’est pas transformé, et personnellement je suis resté très extérieur au film. Un film comme ça, ça doit te prendre aux tripes, mais on en est loin. On a l’impression que Tavernier fait tout pour qu’on ne ressente rien.

« Vivre et rien d’autre » nous raconte donc la rencontre de trois personnes : le commandant Delaplane chargé de la délicate mission de retrouver les poilus disparus. C’est un personnage intègre pour qui chaque vie à la même valeur, et refuse donc de donner la priorité à une femme sous la raison que son mari est le fils d’un sénateur. Cette femme d’ailleurs, c’est Irene de Courtil, une femme aisée dont le mari est partie à la guerre en mai 1917 et qui n’a depuis plus de nouvelle. Elle se met donc à inspecter les différents hôpitaux en espérant retrouver son mari. Un jour, elle apprend qu’un train sanitaire disparu a été pris dans l’effondrement d’un tunnel. Elle se rend donc là-bas dans l’espoir de retrouver une trace de son mari, et c’est alors qu’elle fait la connaissance d’Alice, une jeune institutrice dont le fiancé a également disparu. Très vite les deux femmes vont se lier d’amitié, de part leur situation commune. Le fait est qu’au final, la quête de l’amour perdu de ces deux jeunes femmes est très mal traités par Tavernier, on n’arrive pas à éprouver d’empathie pour les deux femmes, tellement leur comportement parait étrange.

Alice qui par exemple se met à fricoter avec le jeune artiste, ou qui se dit après avoir trouver un couteau suisse qui pourrait appartenir à son fiancé que finalement ce n’est que le couteau d’un mort. Le caractère versatile s’observe également chez Irene, qui passe de la personne froide et marginale à la personne enjoué prête à danser avec les militaires, puis quelques minutes d’un coup d’un seul quitter cette foire avec son discours féministe. Mais une chose en plus relie ces deux personnages, c’est le fait qu’au final les deux hommes qu’elles essayent de retrouver sont une seule et même personne. Chose que l’on apprend au bout d’une heure trente de film. C’est alors qu’on se demande où va partir Tavernier. Pourquoi ajouter ça, il essaie de relancer l’intérêt du mec qui s’ennuie en nous sortant un peu de mélodrame. Au final, cette révélation ne se fera qu’à moitié et qu’à Alice, où le commandant lui dira qu’on a trouvé une alliance sur le corps de son fiancé signifiant qu’il été déjà marié. On s’attend à ce que Alice se sente trahi, se morfonde, mais elle tire la gueule se barre, et le lendemain, elle est déjà sur la bécane du jeune artiste.

Concernant le personnage de Noiret, c’est certes un peu mieux que pour les deux femmes, mais l’histoire d’amour entre lui et Irene est quant à elle aussi mal gérer. Le commandant Delleplane en amoureux transi, qui pique une crise de jalousie sortit d’on ne sait où après avoir entendu une conversation au téléphone de Irène. Delleplane pendant quasi tout le film de conquérir Irène, et qui au final, loupe le coche, et est condamné à lui envoyer des lettres à travers l’Atlantique, 2 ans après. Triste histoire d’amour n’est-ce pas, mais bon, ça a peut rien à voir avec le film et ça vient saborder le film, qui a un gros problème de rythme.

L’une des autres points abordés dans le film est la recherche du fameux soldat inconnu que l’on enterrera sous l’Arc de Triomphe, même si cela débouche sur la scène la plus réussi du film, une reconstitution quasi parfaite de la véritable cérémonie, le chemin pour y arriver est particulièrement laborieux. En effet, dans chaque scène montrant le capitaine Perrin dans sa galère pour trouver un soldat inconnu, on a l’impression que Tavernier essaie de détendre l’atmosphère en voulant nous faire rire. D’abord en nous montrant un entretien entre Perrin, et une fermière un peu paumé qui a du mal à comprendre la signification du mot inconnu, ou plus tard en nous montrant Perrin et quelques jeunes asiatiques ayant des problèmes à extraire un cercueil pour cause que toucher un mort est contre la religion de ces jeunes asiatiques. Le problème, c’est que ça rate à chaque fois, et c’est limite si on est pas mal à l’aise tellement le ton est différent du reste du film.

Le film n’est pourtant pas exempt de qualité, en ce qui concerne la photo, on retrouve bien cette atmosphère terne dû à ce qui vient de se passer. On a le droit à une critique des profiteurs de la mort à travers 3 personnages. Le sculpteur qui se réjoui du regain d’intérêt pour son art de par la création des monuments aux morts dont lui et ses collègues ont la charge, mais également les deux villageois dont le village n’a malheureusement pour eux subit aucune perte durant la guerre, et vont aller jusqu’à demander l’annexion au village du ferme voisine ayant perdu 2 personnes, dans le but d’obtenir des avantages de l’Etat. Et puis, au final le personnage du commandant Dellapane qui nous offre une belle tirade sur le fait que ce soldat inconnu, c’est oublier des centaines de milliers de jeunes gens qui ont perdu la vie pendant la Grande Guerre.

En conclusion, je ressort très déçu de mon visionnage, voir même frustré car Tavernier avait un sujet en or, et que trop rarement exploité ( je n’ai pas d’autre film traitant du sujet directement en tête) mais le sabote complètement avec des personnages ratés et des tentatives scénaristiques plus que douteuses.
Bondmax
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Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Parce que en 2014 aussi , je ne vais pas que regarder des James Bond

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le 10 avr. 2014

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Bondmax

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