J'ai l'impression de rougir un peu en mettant un 8 à "La vie rêvée de Walter Mitty", je ne l'assume pas encore pleinement. Il récompenserait le coup de cœur ressenti pour ce film dont la bande-annonce promettait déjà beaucoup, et qui a tenu ses promesses.
Derrière une morale relativement habituelle dans le cinéma américain, et qui a d'ordinaire la fâcheuse tendance de dégouliner en moraline conchiable à merci, dans le style "Ne rêve pas ta vie. Vis tes rêves", ou "Vouloir, c'est pouvoir", ou encore "Un bon Américain n'a pas de limites", se cache une œuvre saisissante de poésie et d'optimisme timide et frais, drôle par moments (mention spéciale à Todd, d'eHarmony), émouvant à d'autres, toujours juste.
Walter Mitty est un homme normal. Comme je l'ai lu dans une autre critique remarquable, ce n'est ni un surhomme, ni un cas social. Il accomplit un travail remarquable avec application pour gagner sa vie et permettre la renommée de l'aventurier-photographe Sean O'Connell (émouvant Sean Penn, pour le peu qu'il apparaît). Walter a une existence somme toute assez banale, et il rêve.
Amoureux en secret d'une collègue, Cheryl, somme toute assez banale également (pas une bimbo, quoi), il ne sait pas exactement comment s'y prendre pour lui exprimer son transport. Et c'est lorsque, aidé par Cheryl, il doit partir sur la trace de Sean pour récupérer le négatif n°25 malencontreusement égaré, que commence son aventure étonnante, en forme de voyage initiatique, qui l'emmènera au Groenland, en Islande (pour l'éruption du célèbre volcan immortalisé par Dany Boon... *tousse*), en Afghanistan aux confins de l'Himalaya.
Entendons-nous : tout n'est pas parfait. Le méchant businessman barbu avec ses courbes de rentabilité et ses acolytes grinçants est trop cynique pour mériter de l'intérêt. La romance est un peu simple. Le final est assez prévisible. Mais on en fera abstraction, pour tirer la quintessence (la fameuse) de l’œuvre de Ben Stiller, qui marie la poésie à une réalisation absolument remarquable : photographie parfaite (c'était la moindre des choses, vu le sujet ; avec une multitude de plans, même parfois anodins, remarquablement cadrés et lumineux), acteurs parfaits, dialogues satisfaisants, scène d'intro parfaite, et bande originale au poil.
Je vais me répéter, aussi, mais il faudra qu'un jour le cinéma français dans son ensemble aille prendre des leçons de narration en Amérique, pour apprendre à raconter une histoire d'une manière intéressante, comme dans ce film.
En bref, un petit moment de poésie, d'amusement et d'évasion, condensé dans un film doté de grandes qualités et de menus défauts.
Allez, je vais oser : 8, recommandé, et dans mon panthéon cinématographique, dans une place discrète, pour qu'on ne le remarque pas trop quand même... Advienne que pourra.