La Voix de son maître par Jibest
Aujourd'hui le débat public s'est fragmenté avec les nouvelles technologies. Désormais chaque chapelle dispose de son journal, blog, page facebook ou site internet ou les convertis se voient confortés dans leurs convictions sans possibilité de débat. C'est pourquoi je salue SC qui permet le débat (sauf avec quelques sectaires qui n'aiment pas quand on ose contrer leurs arguments fallacieux et ne savent répliquer qu'en bloquant les débats qu'ils ont eux-mêmes déclenché).
Ici, à la fin des années 70, les réalisateurs ont interrogé des patrons de grandes entreprises françaises. Bien qu'étant très à gauche, je suis quand même content de connaître leurs arguments et leurs pensées. Surtout que dans ce film on est très loin du "Ouin ouin y'a trop d'impôts. On n'est pas compétitifs avec la Chine et l'Ethiopie!" actuel.
C'est là la limite du film : il est devenu totalement anachronique. On voit encore la France industrialisée issue des 30 glorieuses, la montée de la gauche du "Programme Commun" qui ne s'est pas encore compromise au pouvoir avec le libéralisme européen, le syndicalisme dominé par le PCF. Peut-être un "remake" sera-t-il nécessaire? Sauf si c'est pour entendre "Ouin ouin on est moins compétitifs que le Bangladesh!" évidemment.
Les propos des patrons, même si on peut être souvent pas d'accord, sont assez intéressants, sur la production, les rapports sociaux, leur parcours personnel... On découvre par exemple qu'ils sont contents de négocier avec les syndicalistes politisés et non pas avec les corporations maffieuses (là je suis d'accord).
Bon ils sont satisfaits d'eux-mêmes et ne se privent pas de le faire savoir (mais s'ils ne disaient pas du bien d'eux-mêmes, qui le fera pour eux?) mais ça reste une expérience sympathique et stimulante.
Sinon parmi les particularités du film, on remarque un début intéressant sur le titre du documentaire que les patrons n'apprécient pas. Les réalisateurs ont fait un effet de montage (tu ne l'as pas remarqué Gallu?) en montrant de temps à autre des interviews de patrons (en commençant par celui de Darty) dans des télévisions situées dans des ateliers de montage. Il s'agit ainsi d'une distanciation par rapport aux propos des interviewés et qui montrent la distance et le manque d'échanges entre les patrons et les ouvriers.