Greta Gerwig a bien de la chance : la critique l'adule aussi bien comme actrice, icône d'une nième vaguelette du ciné indie US - même quand elle ressasse les mêmes "trucs" d'interprétation - que comme auteur(e)-réalisatrice débutante - même si elle n'a pas forcément grand chose de nouveau à nous offrir.
Plutôt "femme oiseau" ("Lady Bird") légère et gracieuse que "coccinelle" (Labybird) butée et cruelle, sa Christine de 17 ans accumule les stéréotypes du film de genre "passage à l'âge adulte" à un point qui deviendrait facilement insupportable si le film de Gerwig ne bénéficiait d'atouts imparables : d'abord le charme un tantinet étrange de Saoirse Ronan, toujours impeccable dans le décalage vaguement malaisant ; ensuite l'humour "new yorkais" de Gerwig, qui offre, un peu à la manière d'un Woody Allen, une sorte de commentaire "méta" permanent à la banalité -voire l'usure - de la fiction.
Bref, ici, tout le monde est finalement gentil, l'amour règne même s'il avance caché (je pense au beau personnage de la mère, seul semblant d'aspérité dans un film bien trop lisse), et le désordre provoqué par la mini-révolte de Lady Bird - qu'il faut relativiser, on parle quand même ici d'un milieu white middle class profondément catho - a tôt fait d'être anihilé par la bienveillance de tous et par le "bon fond" bien raisonnable d'une jeune fille qui n'ira guère plus loin qu'un unique coma éthylique.
Pourtant, malgré cette tiédeur qui, ailleurs, serait fatale au film, "Lady Bird" évite le pire grâce à la jolie légèreté de sa narration et de sa mise en scène, qui choisit systématiquement d'effleurer le sens des scènes, de fuir le pathos, et de laisser de manière assez habile le spectateur se débrouiller avec ses propres émotions. Un sourire aux lèvres.
Peut-être est-ce cela, "l'effet Greta Gerwig" ?
[Critique écrite en 2018]