Kōsaku Yamashita le réalisateur du premier volet revient pour un cinquième épisode assez différent des précédents. Oryu est dorénavant une yakuza accomplie depuis qu'elle a succédé à son père à la tête du clan Yano et a été adoubée par les principaux chefs yakuzas. En revanche, la reconnaissance qu'elle a obtenue dans ce milieu ne remplace pas le manque de considération qu'on lui porte en tant que femme, ainsi que lui fait remarquer l'un de ses subordonnés avant de mourir. Non mariée, sans enfant, ne connaissant que le monde du jeu des yakuzas, auquel elle s'est consacrée toute sa vie, elle aspire désormais à un peu plus d'équilibre. L'occasion lui est donnée lorsqu'elle décide de s'arrêter dans un village de paysans cultivateurs d'indigotiers, où elle est hébergée et se range un temps pour participer à la vie et aux travaux quotidiens de la communauté. Le chef du village est un ancien yakuza, lui aussi rangé, et qui devient rapidement un allié d'Oryu. Cette dernière découvre une vie paisible et développe un comportement maternel à la faveur d'une petite fille qu'elle prend sous son aile après qu'elle a perdu sa mère, et bientôt son père.

Mais des événements sociaux et économiques vont rompre cette parenthèse enchantée. A cause de la hausse des taxes foncières et de la marge toujours plus importante des grossistes, les paysans acculés entrent en rébellion et reçoivent bientôt le courroux des yakuzas locaux, appuyés par les notables pour remettre les métayers au travail et ne pas compromettre ni la récolte, ni l'organisation du prochain festival qui est la principale source de revenus du clan local. Oryu et le chef du village (Kyōsuke Machida) vont prendre la défense des villageois, et après plusieurs tentatives de régler ce différend à l'amiable, le manque d'honneur et le comportement des yakuzas locaux vont conduire à un inévitable affrontement final, particulièrement sanglant.

Plusieurs éléments nouveaux sont introduits ici. D'abord la psychologie d'Oryu, tiraillée entre sa vie de yakuza exemplaire et ses aspirations à vivre en tant que femme et mère. La séquence finale où elle observe émue la petite fille danser, avant de s'éloigner et quitter le village sous un soleil accablant (un final à la Zatoichi) est assez éloquente. Aussi, le jeu est mis au premier plan avec plusieurs parties de cartes (Tehonbiki) où Oryu montre toute sa dextérité. On retrouve aussi plusieurs séquences de jeu (Tehonbiki, Chō-Han) dans l'épisode suivant mais jamais dans la série cette part n'avait revêtu autant d'importance dans la mise en scène.

Ensuite le combat final est long et sanglant, et particulièrement sublimé par la musique entraînante du Awa Odori qui se déroule en fond à l'occasion de la fête du village. Oryu apparaît d'ailleurs dans la tenue de danseuse traditionnelle d'Awa.

Le casting est probablement le meilleur de toute la série. Si Ken Takakura n'apparaît pas dans cet épisode, en revanche on y trouve Kōji Tsuruta l'autre grand acteur de la Tōei. Kyōsuke Machida impeccable, donne la réplique à Junko Fuji, de même que Tetsurō Tanba dans un rôle secondaire et Tomisaburō Wakayama pour son habituelle apparition cabotine.

Enfin le format est inhabituel d'1h50 alors que la série tient généralement dans les 1h35 (en étant pointilleux je dirais que le film recèle quelques longueurs).

Un très bon épisode, à classer parmi les deux ou trois meilleurs de la série.

[7,5]

Yushima
7
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le 23 août 2023

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