Laurence Anyways est un très beau film sur la forme, avec une photographie admirable et de la musique bien choisie. Il y a beaucoup de qualités dans les dialogues, dans les moments d'émotion du couple Laurence-Fred, qui est sans doute l'un des plus forts que j'ai jamais vus à l'écran. C'est mon premier Dolan, et je dois dire que faire un film aussi soigné à 23 ans, c'est chapeau ! Mais, pour juger objectivement Laurence Anyways, il me faut surtout évaluer son fond puisque le film porte en lui une critique sociale.


Sur le fond, Laurence Anyways s'inscrit dans le courant du "cinéma social", ce qui je l'admets volontiers, n'est pas mon répertoire favori. En effet, je ne pense pas que le cinéma soit le bon format pour l'analyse sociale. Un documentaire, une enquête ou encore mieux, un roman ou un essai me semblent plus adéquats à cette fin. Le cinéma ne doit pas tirer sa substance des problématiques sociales. Je sais, c'est une affirmation personnelle, mais j'y crois fortement. Je pense que le cinéma doit raconter une histoire avant de raconter un problème de société. Et je suis toujours déçu lorsqu'un film se perd en essayant de faire les deux.


Laurence Anyways porte sur la vie d'une femme trans qui fait son "coming out", et décrit les conséquences sur son entourage: sa partenaire, sa famille, sa vie professionnelle... Quelle est finalement la thèse dominante du film, lorsque l'on écrème l'essentiel de ces 2 heures et 40 minutes de mélodrame ? C'est l'impossibilité pour Laurence de vivre avec des personnes différentes d'elle, et c'est l'échec de sa relation amoureuse avec Fred. Les seules personnes qui vont accepter Laurence, c'est une communauté marginale, comme elle. N'est-ce pas là une conclusion extrêmement déprimante? Les minorités de genre ou sexuelles sont-elles condamnées au communautarisme ? L'échange final entre Laurence et Fred en dit long à ce sujet. Fred n'a pas changée. Mais Laurence semble s'être déconnectée de cette réalité qui ne l'a pas "acceptée". La Laurence sympathique, altruiste, ouverte d'esprit, s'est "transformée" en une Laurence parfaitement assumée et, dans le même temps, pleine d'arrogance dans ses interactions avec ces personnes qui lui sont désormais presque étrangères car elles appartiennent à la "norme".


Le message implicite de Laurence Anyways est finalement la survie par le communautarisme. Mais malgré la prétention du film à offrir une réflexion sur le sujet, cette idée reste très superficielle. Si Xavier Dolan veut penser ces questions de genre et de sexe, pourquoi n'écrit-il pas un livre pour en donner plus de substance?


Plutôt 6,5/10, pour la qualité technique.

Philip-Marlowe
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le 14 nov. 2020

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Philip Marlowe

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