Les frères Ian et Dominic Higgins s'étaient fait connaître par leurs graphismes et leurs effets spéciaux, quand un producteur, Natasha Howes, leur commanda un court métrage sur le miracle de Fatima. Pour un budget à peine supérieur, ils lui proposèrent un véritable film.
Tourné sur place, le scénario se veut le plus proche possible des faits historiques, à savoir une apparition, reconnue par la hiérarchie catholique, de la Vierge Marie à trois enfants portugais, chaque 13e jour du mois de l'année 1917.
La créativité des lumières ou des cadrages est séduisante. Le subtil traitement de l'image évoque les chromos sulpiciens, si prisés par nos arrière-grand-mères. Ce néologisme a été créé par Léon Bloy dans La femme pauvre. Ce prodigieux pamphlétaire a connu une courte résurrection quand il fut cité, le jour de son investiture, par le pape François. Produit et vendu au XIXe dans le quartier de Saint Sulpice, l'artisanat sulpicien se caractérisait par une production en grande série de pièces de bondieuserie, statues en plâtre, images et bibelots de dévotion, aux couleurs délicieusement jaune d'or, rose bonbon et bleu pastel. Le tout était destiné à émouvoir et rassurer un fidèle inquiété par la progression de l'impiété et la perte des traditions ; déjà…
Le 13e jour joue avec l'imagerie traditionnelle du conte : la peur des gentils enfants incompris, le chaudron et le fouet, la marâtre et l'inévitable sorcier. Le rôle de méchant est endossé par un édile farouchement anticlérical. Inquiets pour leurs récoltes dévastées par des curieux, chaque mois plus en plus nombreux, les propres parents des " voyants " refusent de croire à la réalité des fameuses visions. Le moment est venu pour la Vierge de livrer ses fameux secrets, promettant aux enfants un destin tristounet ; une mort rapide pour les deux plus jeunes et une longue vie contemplative pour l'aînée ; et un (très) signe pour convaincre les multitudes incrédules. Les deux magiciens (du traitement de l'image) nous offrent alors une stupéfiante vision de l'impensable !
Mars 2018